Le passage en question se situe de la page 103 à la page 108, et concerne le « couple » Borvo / Damona.
La cause de mon intérêt fut en fait, le parallèle qui s'établit dans mon esprit entre ce texte et de très vieux souvenirs de mon enfance. Souvenirs de catéchisme pour être précis...
J'ai grandi dans le petit village de Saint-Victurnien en Haute-Vienne, et voici ce que je me rappelle de la vie du saint telle qu'on me la racontait à cette époque. (Ce sont de très vieux souvenirs, aussi me sera t'il beaucoup pardonné...)
« Saint-Victurnien était un prince écossais qui s'était retiré dans la vallée de la Vienne pour y vivre une vie d'ermite. Il s'établit auprès d'une source. Une vache, venue d'un village voisin traversait quotidiennement la rivière pour venir écouter les prêches du saint. Intrigué par le comportement du bovidé, les villageois suivirent l'animal, et découvrirent l'ermite. Le saint homme guérit miraculeusement plusieurs personnes. L'évêque fut mis au courant des faits et se déplaçât pour juger lui même de la situation. À l'arrivée de l'évêque, l'homme était mort. Le caractère « saint » de l'ermite fut établi. Puis arriva une délégation écossaise pour récupérer le corps. Mais au lieu-dit « la Croix des Châtaignolles », les bœufs qui tiraient le chariot ne purent quitter la vallée comme si leur chargement était devenu soudain trop lourd. Les reliques restèrent donc dans la vallée où elles devinrent l'objet d'un culte. »
Des guérissons miraculeuses continuèrent, bien entendu, à avoir lieu. Ces miracles étaient le fait des reliques du saint exposées dans l'église selon Monsieur le curé, mais étaient surtout dû aux vertus de la fontaine miraculeuse d'après les « vieux » du village.
Vous comprendrez donc, j'espère, pourquoi l'association « Guérisseur / Source / Vache / Borvo / Damona » c'est faite dans mon esprit. Mais s'il est vrai qu'une hirondelle ne fait pas le printemps, il est surement vrai aussi, qu'il faut plus qu'une vache pour faire un dieu gaulois, sinon Fernandel entrerait instantanément dans le panthéon celtique grâce à sa Marguerite. Les vagues souvenirs de catéchisme d'un vieil athée étant décidément fort peu de choses, je décidais de « gratter » un peu...
Bilan de mes premières recherches :
Saint Victurnien étant un saint très « mineur », je n'ai quasiment rien trouvé à la BFM de Limoges (Bibliothèque Francophone Multimédia).
Sur le Web, pas grand choses non plus... À part ce petit texte :
http://saintamand87.chez-alice.fr/VICTU ... 5B1%5D.htm
Ce n'est pas encourageant, ma vache a disparu, pour devenir un « bœuf mugissant ». Le Saint est mort sans avoir pu accomplir aucune guérison miraculeuse ni faire la démonstration de sa « sainteté ».
Je n'ai pas jugé nécessaire de contacter le rédacteur de ce texte, car j'ai retrouvé exactement le même récit dans un « Programme officiel des Ostentions de 1974 à Saint Victurnien ». Le texte trouvé sur le Net n'est qu'un copier/coller du susdit programme.
Je me suis donc rendu à l'évêché. Je connais mal le fonctionnement des structures religieuses, mais l'accueil fut plutôt sympathique. Un monsieur prit sur son temps (il avait visiblement pas mal d'autres choses a faire) pour me répondre. Réponses sommaires, mais bon, comme je l'ai dit , la personne semblait occupée.
Bref, il me fit les photocopies de quelques pages d'un bouquin (dont je n'ai pas eu le loisir de prendre les références).
Voici ce que dit la page qui parle un peu du Saint :
« SAINT VICTURNIEN
Sa « vie », rédigée dans un latin de type humanistique, en fait dans la transcription du chanoine Collin, un « Écossais de bonne naissance », venu s'établir au bord de la Vienne à environ quatre lieues de Limoges en un endroit « si sauvage qu'on l'appelait la Vallée Ténébreuse ». Fuyant le commerce des hommes, Victurnien ne négligeait pas de soulager ou guérir les aveugles, les sourds et particulièrement, « ceux qui dans l'ardeur d'une fièvre aiguë tombent en quelque frénésie ou, par quelque accident sinistre, venaient à perdre l'usage de la raison » (Il s'agit sans doute d'une allusion au « Mal des Ardents »). On retrouve ici quelques lieux communs hagiographiques avec apparemment une méprise quant aux origines du pieux ermite dont le nom n'a rien de celtique.
D'ailleurs si Geoffroy de Vigeois signale l'existence de ses restes sur les bords de la Vienne, Bernard Gui précise qu'il repose dans l'église du lieu, dédiée au premier martyr Étienne. Il semble bien que la dévotion populaire ait ici aboli, comme parfois, le vocable ancien au profit du saint local « canonisé » par la foule. Bernard Gui ajoutait que sa vertu essentielle était de faire échapper ceux qui l'invoquent à la dent du loup et des bêtes féroces.
De Victurnien que l'on peut situer dans le temps au VIIe siècle, on dit qu'il est mort un 30 septembre. Sa fête fut déplacée au 1er octobre pour laisser la place à saint Rémi et à saint Vaast, à la fin du XVIIe siècle. L'invention de ses reliques se célébrait le 15 octobre.
Le « Pouillé » de la fin du XVIIIe siècle ne relevait que deux emplois du vocable dans tout le diocèse. Le tombeau du saint, surmonté d'un autel maçonné et revêtu de peintures au XVe siècle, comporte un passage à demi enterré et à l'arrière, deux ouvertures circulaires où l'on passait par dévotion la tête, les mains ou des mouchoirs, disposition semblable à celle des églises de Saint-Cessateur à Limoges, aujourd'hui détruite, de Saint Junien et d'Uzerche. Un ancien buste reliquaire portait dans le bas une inscription latine qui avait déjà disparu au XVIIe siècle mais qui signalait le don fait l'église dans les années 1400 par Adémar de Rochechouart, archidiacre de Dijon.
J.D.
Bibliographie :
On consultera : Collin, 1672, p. 425-428 ; Legros : ms. 26 (3), p. 1191-1200 ; Geoffroy de Vigeois, p. 26 ; Aubrun, p. 324-325 ; Saints limousins et marchois des églises de la Haute-Vienne, 1991, p. 134-135 ; Becquet, Répertoire alphabétique... »
Trois autres pages seulement contenaient des bribes d'informations :
À quelles informations ont eu accès L. Bonnaud et J. Perrier pour identifier Saint Victurnien à sa vêture de feuillage ?
Tiens, voilà ma vache qui refait surface ! Dans un rôle nourricier, et présente au moment du décès...
On peut voir l'image de la scène de la découverte du corps en 17ème position sur la page Web suivante : http://www.culture.gouv.fr/public/mistr ... 4%24%2534P
Bref, cette histoire semble avoir subi plein de distorsions et je ne suis pas certain d'arriver à m'en démêler tout seul...
Qu'en pensez vous ? Dans quelle direction dois-je poursuivre mes investigations ?