Page 6 sur 10

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 20:29
de Alexandre
Shiva est un dieu de l'hindouisme qui a pour "ancêtre" védique Rudra. Je ne sais pas trop si ça change quelque chose...

Non, c'est vrai mais ça ne change rien !

Dans la mythologie germanique, la première fonction était partagée au départ entre un dieu varunien, Odin, et un dieu mithréen, Tyr, et c'est seulement ensuite qu'Odin a pris toute la place. Comme à Rome avec Jupiter et Dius. Odin n'est devenu le roi des dieux qu'après avoir relégué Tyr au second plan.

En Grèce aussi, ce que l'on appelle les deux aspects de la 1e fonction ont toujours été distincts, mais avec des "redites" : Zeus est le dieu législateur, mais la relégation de Poseidon a eu pour conséquence que dans le contexte de la dichotomie dieu lumineux législateur / dieu sombre sorcier, Zeus est "suppléé" par son fils Apollon, suivant un schéma inspiré de conceptions sémitiques (le "fils idéal" du dieu).
La caractérisation du duo delphique Apollon (dieu lumineux, législateur) et Dionysos (dieu sombre, sorcier) remonte à Nietzsche, c'est à dire bien avant Dumezil.

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 21:59
de Taliesin
l'opposition Zeus/Poséidon par rapport à celle Dagda/Ogme est claire pour moi, vu les traits varuniens des dieux aquatiques irlandais et inversement, les rapports de Ogme avec l'eau (sans pour autant aller jusqu'à identifier Nechtan et Ogme.)

Mais ce qui me pose problème, c'est le côté sombre de Dionysos. Il est à la fois destructeur et générateur, et il n'a rien d'un dieu varunien castré.

Ou bien l'opposition Mitra-Varuna définie par Dumézil est à ranger aux oubliettes ?

Pour Nietzsche, Dionysos, c'est l'éxubérance de la vie.

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 22:38
de Alexandre
Et pourtant...
Varuna-Rudra-Shiva est un dieu ithyphallique, il est accompagné d'un cortège de satyres, mais il est impuissant et n'a pas de descendance. Il n'a rien d'un dieu castré : au contraire, il est parfois représenté simplement par un phallus géant appelé lingam.
Dionysos a parmi ses attributs un coq à tête de phallus, il est semblablement accompagné d'un cortège de satyres, mais semblablement il n'a pas d'enfants.

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 22:51
de DT
Salut

Taliesin a écrit: Ou bien l'opposition Mitra-Varuna définie par Dumézil est à ranger aux oubliettes ?


Chacun a le droit de s'exprimer ; il est toutefois inutile de condamner de façon péremptoire.

C'est plutôt Nietzche qui a été mis aux oubliettes, car de l'ordre d'une simple philosophie et particulièrement mal réinterprété à un certain moment.
Le reste appartient-il au Mandarom ?

A+

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 23:13
de Taliesin
Autre chose : la distinction dieu lumineux/dieu sombre est-elle bien pertinente ? Poséidon a des aspects lumineux (Bernard Sergent le rapproche de Apam Napat, le Feu dans l'Eau indien). De même, Ogme a pour surnom "visage de lumière".

Pareil pour la magie : le Dagda est autant, sinon plus magicien qu'Ogme. Il le trompe même (de deux façons) lorsqu'il modifie le cours du temps pour faire un fils à Boann.

La distinction entre un dieu fécondateur, patronant la troisième fonction productrice, opposé à un dieu châtré patronnant la deuxième fonction guerrière ne serait-elle pas plus juste ?

Dans ce cas, le dieu châtré grec, opposé à Zeus, serait Ouranos. Son fils Typhon, qui correspond au dragon indien Vrtra, fut tué par Zeus. Comme en Inde, on a donc bien un rapport entre le dieu varunien châtré et le dragon/typhon.
Poséidon, lui, a eu de nombreux enfants. Ouranos aussi - surtout des monstres - mais c'était avant d'être émasculé par Cronos.

Problème, Ouranos règne seul avec Gaia, il n'y a pas de dieu mithréen de sa génération pour former couple avec lui. Ensuite, après les Titans, Zeus règne avec ses deux frères, Hadès, dieu des morts, et Poséidon. Hadès ne serait-il pas plus près du côté sombre que Poséidon ? On aurait alors une triade de première fonction avec un couple classique Mitra-Varuna et un dieu des eaux.

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 23:22
de Taliesin
DT a écrit:
Chacun a le droit de s'exprimer ; il est toutefois inutile de condamner de façon péremptoire.

A+


Ben, vu qu'il y a un point d'interrogation à la fin de ma phrase, je doute que cela puisse passer pour une condamnation, de surcroît péremptoire. Cela pourrait être éventuellement interprété comme un doute, mais il ne s'agissait en fait que d'une simple question.

concernant le côté sombre de Dionysos : il meurt en hiver pour renaître au Printemps. Il est plutôt lié à la saison claire qu'à la saison sombre, non ? Et puis, son côté destructeur, ça rappelle un peu le Dagda avec sa massue qui tue d'un côté et ressuscite de l'autre. Mais le Dagda a eu des enfants.

MessagePosté: Mer 10 Jan, 2007 23:58
de Alexandre
Ça fait beaucoup de questions !

C'est vrai qu'on peut toujours trouver des traits lumineux à un dieu sombre. Mais essayez donc de trouver une épiphanie de Poseidon au grand jour. Quand à Dionysos, comme Shiva, il est certes parfois qualifié de lumineux, l'un et l'autre sont aussi qualifiés de "rôdeur de nuit".
Après tout, le Diable est parfois désigné comme Lucifer : ça n'en fait pas un personnage lumineux.

Une remarque du même ordre vaut pour la magie. Tous les dieux sont plus ou moins amenés à user de magie. Mais la magie est proprement constitutive du dieu sombre de 1e fonction.

concernant le côté sombre de Dionysos : il meurt en hiver pour renaître au printemps. Il est plutôt lié à la saison claire qu'à la saison sombre, non ?

A Delphes, il était vénéré exclusivement en hiver, Apollon, dieu très directement solaire, étant vénéré tout le reste de l'année.

Au fait, où as-tu trouvé que Typhon était fils d'Ouranos ? Chez Hésiode il est fils de Gaïa et du Tartare.

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 9:46
de Taliesin
Bonjour,

Au temps pour moi, j'ai lu trop vite sur Encarta : Typhon est le dernier fils de Gaia, et l'article ne précise pas qui est le père, mais parle d'Ouranos juste avant, d'où ma confusion.
J'ai des lacunes en mythologie grecque, et donc beaucoup de questions.

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 18:29
de Muskull
Pour en revenir au mythique dragon, reptile au corps froid et écailleux tel les armures anciennes...
A mon sens rien n'empêche une cavalerie guerrière de prendre en étendard un des aspects destructeurs de 1° fonction car il sont de fait son "bras" et qu'ils soient le bras de la forme sombre (souterraine) de la 1° fonction n'a rien de surprenant car la guerre est toujours destructrice de l'équilibre antécédant.

Par contre il faut être prudent entre ce qui est sombre ou clair dans le domaine I.E. et leurs idéologie car entre des peuples aussi voisins que les persans et les indiens védique, il y a une inversion totale entre les Asuras (forces de vie) et les Dévas (êtres de lumière).
Cette dychotomie cosmogonique des êtres divins semble équilibrée au départ puis ils entrent en conflit dans les idéologies comme les Ases et les Vanes des skaldes.
"En Iran les Daevas sont diabolisés en tant "qu'adversaires du Seigneur Sage" et les Ahuras sont ses alliés.
En Indes les devas deviennent les seuls dieux véritables et les Asuras sont les "rivaux des dieux". "(J. Varenne in Zoroastre le prophète de l'Iran)

Bref, il y a du grain à moudre entre les Fomoires et les T.D.D. surtout que ceux-ci se réfugient dans le domaine souterrain pour laisser place à Lug, non pas dieu mais homme parfait selon mon analyse.

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 18:34
de Fergus
Qu'est-ce qu'un dieu, sinon un homme parfait ?... :wink:

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 18:41
de Alexandre
Par contre il faut être prudent entre ce qui est sombre ou clair dans le domaine I.E. et leurs idéologie car entre des peuples aussi voisins que les persans et les indiens védique, il y a une inversion totale entre les Asuras (forces de vie) et les Dévas (êtres de lumière).

Comme tu le dis si bien, il s'agit bien d'une inversion. Quand je parle du dieu lumineux et du dieu sombre de 1e fonction, je me réfère évidemment à ce que l'on reconstitue pour les Indo-européens.

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 19:02
de Muskull
Fergus a écrit:Qu'est-ce qu'un dieu, sinon un homme parfait ?... :wink:

Je dirais que ce sens traduit une inflexion d'une tradition primordiale vers le social et la condition humaine, donc vers le polythéisme...
Des rénovateurs comme Zarathustra, Moïse, Shankaracharia et d'autres, sont intervenus pour dire que l'homme était sujet d'un vecteur d'élévation et de subtilité de la pensée, par son effort, qui n'était qu'un des infinis possibles de Dieu.

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 19:39
de Alexandre
Fergus a écrit:Qu'est-ce qu'un dieu, sinon un homme parfait ?... :wink:

C'est là bien mal connaître le polythéisme : un dieu comme Shiva, dans son contexte polythéiste originel, n'est en rien un "homme parfait". On peut le voir en revanche comme la représentation d'une dimension d'une communauté idéale - idéale mais pas parfaite. Grand destructeur, amateur de viande crue, avec tout ce que cela dénote, on peut dans une certaine mesure voir en lui la part de mal nécessaire à la survie de la communauté, ou si l'on veut invoquer les manes de Nietzsche, voir en lui la part de cruauté nécessaire à la survie des civilisations.

Semblablement, dans un contexte monothéiste (ou dans le cas présent plus exactement monolâtre), voir dans le dieu de Moïse un homme parfait, voire même un dieu parfait, est un contresens majeur. Il dit lui-même au demeurant "Ne me vénérez-pas pour ma justice, mais parce que je suis Israel votre dieu".

Croire qu'un dieu est un homme parfait est une erreur de compréhension spécifique du christianisme.

MessagePosté: Jeu 11 Jan, 2007 21:51
de Fergus
Ne nous emballons pas, c'était une sorte de plaisanterie, à destination de Muskull, ce que soulignait le clin d'oeil qui accompagnait ma phrase. Il n'y a pas là d'erreur de compréhension de ma part.

Je souscris entièrement à ce que tu viens d'écrire, Alexandre, comme, en général, à l'ensemble de tes interventions.

MessagePosté: Ven 12 Jan, 2007 12:24
de ejds
Tartarinade : leçon pour les raconteurs d'histoires fausses

Alors que la région de Tarascon a produit des légendes et des personnages à sa mesure dont l'exploit de Sainte Marthe qui aurait capturé toute seule, vers l'an 48 de notre ère, la féroce Tarasque à mains nues : :shock:

Image

Et, "PAN dans les choux !" on retrouvera aussi plus tard cette caricature de roman, ce mytho de Tartarin, grand chasseur de bêtes sauvages et à la joviale bonhomie, mais chevalier suréquipé des temps modernes : :117::45:

tarascon.org a écrit: Tartarin de Tarascon

Tarascon, ville de mythe et de légendes, inspira d'autres contes, ainsi sous la plume d'Alphonse Daudet "Les aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon" voient le jour en 1872.

Il raconte l'histoire de Tartarin, l'intrépide chasseur de casquettes, vantard émérite de cette petite ville de Provence.

http://www.tarascon.org/fr/histoire_tartarin.php

Image

Mais qui était ce personnage ? Dès sa prime jeunesse, Tartarin rêvait d'expéditions, il lisait tous les livres de voyages et il était passionné de chasse. Bavard, vantard, habilement menteur et croyant à ses mensonges, il s'était fait une réputation de grand chasseur dans la ville, malheureusement dans les collines qui entouraient Tarascon, le gibier se faisait rare, alors, un jour, Tartarin décida de s'attaquer à un gibier digne de lui : le lion. Ce fut le départ pour l'Afrique où de périlleuses mais peu glorieuses aventures l'attendaient. Revenu de son périple africain, racontant des exploits extraordinaires qu'il n'avait pas vécu, triomphant et adulé par la population fière de son héros, Tartarin fut auréolé de gloire pour toujours…

Pour revenir sur les dragons des Parthes, Lucien de Samosate (né en Syrie au IIème siécle ap J.-C.) s'en prend aussi aux surprenants raconteurs d'histoires fausses: :shock::lol:

remacle.org a écrit:LUCIEN

....XXV

COMMENT IL FAUT ÉCRIRE L'HISTOIRE
(01)

http://remacle.org/bloodwolf/philosophe ... stoire.htm

29. Un autre historien, mon cher Philon, personnage tout aussi ridicule, n'ayant jamais mis le pied hors de Corinthe et n'ayant pas été jusqu'à Cenchrées (37), loin d'avoir vu la Syrie et l'Arménie, commence de la sorte, si j'ai bonne mémoire : "Les yeux sont de plus sûrs témoins que les oreilles ; j'écris donc ce que j'ai vu, et non point ce que j'ai entendu dire." Et il a si bien vu ce qu'il raconte, qu'à l'occasion des dragons des Parthes, étendards qui, chez eux, guident les corps de troupes, chaque dragon, je crois, servant de guide à mille hommes, il dit que ces dragons sont des serpents vivants d'une grosseur monstrueuse, qui naissent en Perse, un peu au-dessus de l'Ibérie. Quand on se met en marche, on les tient attachés à de grandes piques et élevés en l'air, afin d'effrayer de loin les ennemis, mais dans la mêlée même, quand on s'aborde, on les détache et on les lance sur eux. C'est ainsi que beaucoup de Romains ont été dévorés, d'autres étouffés, broyés sous les nœuds de ces dragons. Il a vu tout cela de près, quoique en sûreté, du haut d'un arbre où il s'était placé en observation. Il a bien fait de ne pas attaquer de front de pareilles bêtes, nous serions privés aujourd'hui d'un historien si admirable, qui lui-même a fait durant cette guerre plusieurs exploits brillants et héroïques. Il a, en effet, couru beaucoup de dangers, et il a été blessé auprès de Sur (38), probablement dans un voyage de Cranium à Lerne (39). Et cependant il a lu tout cela aux Corinthiens, qui savaient fort bien qu'il n'avait jamais vu de guerre, même en peinture. Aussi ne connaît-il ni les armes, ni les machines, ni les évolutions d'armées, ni les ordres de bataille. Il appelle oblique la phalange droite, et dit marcher contre l'aile, au lieu de marcher contre le front.

e.