Page 1 sur 1

Conte du Graal

MessagePosté: Mar 07 Fév, 2006 18:49
de Professeur Cornelius
Texte en ligne du Conte du Graal de Chrétien de Troyes, en langue originale.

http://www.uottawa.ca/academic/arts/lfa ... grpres.htm

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 6:23
de cailleach
Je suis d'opinion que les textes C. Troyes ne sont pas les originals - ils sont textes 'christianisée de contes natifs de la région.
Bien sûr les textes 'originals' de Troyes sont interessant, et révéle beaucoup sur des traces des contes originals.

:wink: Cailleach

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 10:09
de Professeur Cornelius
Les romans de Chrétien de Troyes sont des romans, pas des contes populaires, même si Chrétien s'est basé sur une matière "folklorique" ou bardique.
Je ne sais pas ce que tu appelles "les originaux".

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 14:01
de Taliesin
"Crestëns qui entant et oine v. 60
Par lo commandemant lo comte
A arimer lo meillor conte
Qui soit contez zn cort reizl.
Ce est li contes do greal v. 64
Don li cuens li bailla lo livre."

Chrétien n'aura donc pas perdu sa peine,
lui qui, sur l'odre du comte,
s'applique et s'évertue
à rimer le meilleur conte
jamais conté en cour royale :
c'est Le Conte du Graal
dont le comte lui a remis le livre

Prologue du Conte du Graal par Chrétien de Troyes.

Le comte qui a remis le livre, source de Chrétien, c'est le comte de Flandres Philippe d'Alsace.

Le Conte du Graal est à rapprocher d'un texte gallois, dont le manuscrit est postérieur au roman de Chrétien, qui a subi quelques influences romanes, mais dont certains passages (le graal est une tête coupée dans un chaudron, par exemple) sont archaïques : il s'agit du roman de Peredur.

on a le même problème pour deux autres romans de Chrétien Erec et Enide et Yvain ou le Chevalier au lion, qui ont leurs correspondants dans la littérature galloise : Gereint et Owein.

Il est maintenant pratiquement admis par tous que les textes gallois, bien que plus tardifs, ne dérivent pas de Chrétien de Troyes. L'hypothèse retenue est celle d'une source commune, la discussion porte maintenant sur la langue de cette source : française ou galloise.

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 15:55
de Muskull
s'applique et s'évertue
à rimer le meilleur conte
jamais conté en cour royale :
c'est Le Conte du Graal
dont le comte lui a remis le livre

S'cuses Tal, mais ça veut pas dire que Chrétien est à traduire un livre qu'on lui a remis ?
C'est peut-être le roman de Peredur mais peut-être un autre qui a été perdu. :?
La tête et le chaudron deux "prototypes" celtiques du graal, la coupe semblant être, dans ce même registre, un mythème plus oriental relaté par Ferdusi au IX° siècle dans le Shah Nameh.
Il a pu "accrocher" grâce à la coupe libatoire d'alliance et de transmission de la souveraineté par les femmes des anciens et/ou au calice christique.

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 16:32
de Professeur Cornelius
J'ai pourtant pas pris de digestif, mais j'ai du mal à comprendre ta dernière phrase, Muskull. Suggères-tu que le livre offert par Philippe de Flandre à Chrétien était oriental ? Perse ?

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 17:52
de Muskull
Non, non, les aspects de ce livre ne pouvaient à l'époque circuler seulement dans la tradition orale venue de Sicile ou d'Espagne, il n'était pas traduit.
Il doit s'agir d'un livre roman ou gallois, si Chrétien connaissait le gallois, ce que je ne sais pas.
Une compilation latine est plus probable...

MessagePosté: Mer 08 Fév, 2006 17:58
de Taliesin
oups, pardon, je me suis mal exprimé, ou bien j'ai été trop vite : c'est sur la source du livre que Philippe d'Alsace a donné à Chrétien que porte la discussion, pas sur le livre lui-même. Avec un schéma (ou stemma) :

source commune galloise ou française (perdue) :

1/ > le livre de Philippe d'Alsace, très certainement en français (perdu) > le conte du Graal

2/ > Peredur

il se pourrait bien aussi qu'on ait d'abord une source orale en langue celtique, sous forme d'un ou plusieurs contes, mis par écrit ensuite à la fois en gallois et en français, la version galloise intégrant des traits de civilisation anglo-normande après la conquête de Guillaume, la version française étant christianisée.

Concernant l'existence de sources orales, voir le poème de Rigaud de Barbezieux, dont Rita Lejeune a démontré qu'il était antérieur au roman de Chrétien de Troyes (Rigaud est attesté dans des actes du Cartulaire de Saintonge entre 1141 et 1158, Chrétien écrit le conte du Graal vers 1181).

Atressì com Persavaus 1
El temps que vivia,
Que s’esbaït d’esgardar
Tant qu’anc non saup demandar
De qué servia
La lansa ni’ l grazaus, 6

De même que Perceval
Du temps où il vivait,
Fut si troublé par sa contemplation
Que jamais il ne sut demander
A qui servait
La lance et le graal


Ces sources orales ont pu être transmises aux troubadours occitans de deux façons (qui ne sont pas forcément opposées) :
- par l'intermédiaire du poète gallois Bréri, qui, d'après Wauchier de Denain, aurait rendu visite au comte de Poitiers
- par l'intermédiaire des Bretons armoricains, particulièrement nombreux à Saintes, où se trouve notamment le tombeau de saint Malo, lieu de pélerinage, donc.

Il se pourrait bien aussi que le livre de Philippe d'Alsace ait reçu quelque influence orientale par le biais des croisades auxquelles participa Thierry d'Alsace, le père de Philippe. C'est Thierry qui rapporta à Bruges une fiole du "précieux sang" dont le culte se développa ensuite à Fécamp et en Grande-Bretagne.
Il y a aussi, semble-t-il, des influences orientales dans le Parzival de Wolfram Eschenbach.

Il se pourrait bien aussi qu'au départ le conte de Perceval soit indépendant du Graal. Voir Jean Frappier (Chrétien de Troyes, l'homme et l'oeuvre) :

p. 169 : « Le conte du Graal, que Chrétien laissa inachevé, est dédié à Philippe d’Alsace, comte de Flandre. Ce puissant personnage, qui devait mourir pendant la troisième croisade en juin 1191 devant Acre, avait indiqué lui-même le sujet de ce nouveau roman. Le poète dit certainement la vérité quand il déclare (v. 61-68) suivre le commandement de son protecteur et avoir reçu de lui (probablement entre 1179 et 1182) le « livre » qui contenait le ou un « conte du Graal ». […] Cette œuvre dernière, bien qu’elle ne soit pas inventée de toutes pièces, est un commencement.
On ne peut faire que des conjectures à propos du livre perdu de Philippe d’Alsace. Suivant les théories qui ont été soutenues sur l’origine de la légende, on a supposé de préférence qu’écrit en latin, il constituait une sorte de rituel du Graal considéré comme une relique chrétienne et un vase liturgique, ou bien, hypothèse plus vraisemblable, qu’il était un « conte d’aventure » chargé de merveilleux breton. »

p. 170 : « Dans cette source écrite (le « conte d’aventure »), l’histoire de Perceval était-elle déjà liée à la légende du Graal ? Les deux contes ont pu exister indépendamment l’un de l’autre : Perceval le Gallois est cité dans Erec et Enide parmi les chevaliers d’Arthur, et il reparaît dans Cligès. […] D’autre part, un roman en moyen-anglais, composé vers 1370, Sir Perceval of Galles (Sir Percyvelle), ne fait aucune allusion au Graal ni au roi Pêcheur ; bien que la question soit très discutée, le plus probable est que Sir Percyvelle dérive d’un « conte d’aventure » où l’histoire de Perceval ne s’unissait pas à celle du Graal. Ces indices permettent de croire que le conte du Graal est le résultat d’une combinaison, mais il n’est pas possible de savoir si l’assemblage existait déjà dans le livre ou s’il est dû à la seule initiative de Chrétien."

MessagePosté: Jeu 09 Fév, 2006 21:06
de cailleach
Je pense que le intiative de Chrétien est le concept de chevalerie et les personnages courtois - à mon avis ceci n'est pas un élément trouvé dans les vieux contes gallois

:wink: Cailleach

MessagePosté: Sam 11 Fév, 2006 15:37
de Sedullos
Un grand merci à Taliesin pour avoir cité le troubadour saintongeais, Rigaud de Barbezieux.

[Barbezieux est aujourd'hui en Charente (16).]

On peut trouver le poème complet Atressì com Persavaus dans :

Anthologie des troubadours / Pierre Bec.- 10/18. [p. 115-119]