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Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 13:09
de Mia
Bonjour à tous :D

Vous avez sûrement tous entendu plus d'une fois la chanson "Le loup, le renard et la belette", connue également sous le nom de "La jument de Michao" ou encore "Mais qui est la belette ?" qui est en fait une reprise du groupe Manau.
Voilà, en fait je me demandais quelle était l'origine de cette chanson ? Ces trois animaux font-ils partie d'une légende/mythe ou était-ce simplement histoire d'avoir quelque chose à mettre dans les paroles... ?

J'ai essayé de me renseigner sur le net, mais je n'ai rien trouvé à part le fait que l'origine même de ce chant est contestée (Bretagne ? Vendée ? Bourgogne ? je pencherai plutôt pour Bretagne ... )
Peut-être que les gens en général ont tellement été habitué à entendre leur entourage la chanter qu'il l'ont appropriée et associée à leur région ^^

Voilà, merci toutes vos réponses sont les bienvenues :D

Mia

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Mer 22 Juil, 2009 15:30
de André-Yves Bourgès
bonjour Mia,

votre sujet ne recueille pas d'échos : j'aurais plutôt pensé le contraire... Quoi, interroge-je les spécialistes du forum, point ici de mythe à croquer, d'allégorie à expliciter, de symbole à "exégiser" ?

Comme à l'occasion d'un autre fil de discussion il a paru aux spécialistes que l'utilisation d'un texte "littéraire" du XIXe siècle, qui constitue la réécriture d'une version tardive d'une "légende" bretonne, était une source valable pour une étude comparatiste, je me permets de renvoyer ici à une pièce du Barzaz Breiz, où figurent en qualité de protagonistes le loup, le taureau et l'hermine : cette "trinité" paraît suffisamment appareillée à celle de la chanson que vous évoquez, Mia, pour susciter des interrogations, non ?

j'ajoute que la source en question est, bien sûr, absolument SGDG.

Cum grano salis trecorensis

Cordialement,

André-Yves Bourgès

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Mer 22 Juil, 2009 17:30
de Patrice
Salut,

Ma foi, il n'y a pas du mythe partout, et j'aurai plutôt tendance à penser qu'ici nous avons une simple chanson à danser, sur un thème marrant.
De la même manière que l'évangile des grenouilles était une chanson mnémotechnique.

A+

Patrice

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Mer 22 Juil, 2009 19:29
de André-Yves Bourgès
Patrice a écrit:Ma foi, il n'y a pas du mythe partout, et j'aurai plutôt tendance à penser qu'ici nous avons une simple chanson à danser, sur un thème marrant.


C'est ce que je pense aussi, comme je pense que le texte de Le Braz sur la "légende" de saint Efflam est un "objet littéraire" inspiré par des textes plus anciens qui, depuis les XIe-XIIe siècles au XIXe, balisent une longue tradition dont l'écrivain a recueilli un écho de la bouche de son informatrice à qui il donne tantôt le nom de Le Guen, tantôt celui de Le Guern...

Bien cordialement,

André-Yves Bourgès

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Sam 25 Juil, 2009 18:51
de Muskull
Cher André-Yves,
Je le dis comme je philosophe. :wink:
Une version "tardive" d'un mythe peu avoir plus de signifiants qu'une version plus ancienne par une forme de 'rectification' du mythème.
L'analyse mythologique induit de fait une discontinuité historique, par exemple, un mythème mis à mal par plusieurs narrateurs malhabiles peut être rénové par un narrateur plus "concerné" (plus induit dans le mythème).
Ceci est effectivement très éloigné de ta recherche logique des sources et des effluents historiques qui est admirable, concrète et indispensable à la connaissance mais, que je sache, la pensée humaine est hors raison et ne fait que réagir à des stimulis que la raison ignore. :D
Il y a, d'une certaine façon, un volonté de connaissance qui surmonterait le chaos des informations. L'on peut imaginer une connaissance globale de l'historiographie qui se rapproche des intuitions anciennes de la "sémantique générale" mais au jour le jour nous sommes surtout affligés de présuppositions générales.
Ne pas s'en fâcher et conduire son errance personnelle. :biere:

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Sam 25 Juil, 2009 23:02
de André-Yves Bourgès
Muskull a écrit:Une version "tardive" d'un mythe peu avoir plus de signifiants qu'une version plus ancienne par une forme de 'rectification' du mythème.
L'analyse mythologique induit de fait une discontinuité historique, par exemple, un mythème mis à mal par plusieurs narrateurs malhabiles peut être rénové par un narrateur plus "concerné" (plus induit dans le mythème).


Bonsoir ami Muskull,

Donc, tu veux dire, en ce qui concerne la "légende" de saint Efflam, que Le Braz, plus "concerné" (son hypersensibilité trégoroise ?), aurait "rectifié" un mythème ancien que ses divers prédécesseurs auraient malencontreusement "mis à mal" ? L'hypothèse est hardie et me paraît - plus encore que mes propres objections à l'approche comparatiste telle que décrite par Alexandre, validée par Patrice, encouragée par Sedullos - souligner le risque de biais méthodologique de cette approche.

Sur la seconde partie de ton message, voir ce texte.

Bien cordialement,

André-Yves Bourgès

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Dim 26 Juil, 2009 21:24
de Muskull
André-Yves Bourgès a écrit:Bonsoir ami Muskull,
Donc, tu veux dire, en ce qui concerne la "légende" de saint Efflam, que Le Braz, plus "concerné" (son hypersensibilité trégoroise ?), aurait "rectifié" un mythème ancien que ses divers prédécesseurs auraient malencontreusement "mis à mal" ? L'hypothèse est hardie et me paraît - plus encore que mes propres objections à l'approche comparatiste telle que décrite par Alexandre, validée par Patrice, encouragée par Sedullos - souligner le risque de biais méthodologique de cette approche.

Oui et non dirais-je bien que non normand et trégorois :D
Mais la subjectivité des différents auteurs est intéressante si l'on estime que tous puisent dans la tradition orale. Ce qui n'est pas évident pour tous.
Ainsi des auteurs soumis aux modes et interdits religieux de leur temps peuvent édulcorer certains aspects alors que d'autres traducteurs de cette même tradition orale, n'ayant que leurs tabous subjectifs, peuvent mieux le traduire... plus tard.
La tradition orale est certes évanescente dans un contexte méthodologique, elle s'en échappe en fait perpétuellement car elle n'a pas la même fonction.
Un exemple: L'on analyse plus facilement Homère via Ovide qui donne des "constructions" que par la mythologie comparée orientale qui structure la 'compréhension' de la complexité grecque parce que l'on veut qu'elle soit 'occidentale'.

Dans un niveau dit "informel" de l'analyse de la psychée humaine l'on simplifie à outrance et devant un océan indescriptible l'on s'attache à des termes comme "méthodologie" ou autre comme à des bris d'un navire autrefois sûr.
Un autre temps de sens s'est ouvert depuis longtemps. Si Newton pensait que "sa pomme" était attirée par une gravité fixe, personne avant Einstein ne pouvait imaginer que la planète répondait en attirance en fonction de sa masse à cette chute.
Cette fonction proportionnelle, mise en évidence par les physiciens quantiques démontre que chaque acte, le plus infime soit-il, intervient sur l'univers entier.
En psychologie aussi cette "révolution du regard" existe et de fait j'admire des humains comme B. Sergent et Patrice de chercher et trouver des sens en ce maelström des connaissances écrites.
Je t'admire aussi mon ami, phare précieux en stabilité pour tous les navigateurs en inconnu. :wink:

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Dim 26 Juil, 2009 23:13
de Alexandre
Muskull a écrit:Un autre temps de sens s'est ouvert depuis longtemps. Si Newton pensait que "sa pomme" était attirée par une gravité fixe, personne avant Einstein ne pouvait imaginer que la planète répondait en attirance en fonction de sa masse à cette chute.
Cette fonction proportionnelle, mise en évidence par les physiciens quantiques démontre que chaque acte, le plus infime soit-il, intervient sur l'univers entier.

Parce qu'il en va de ma crédibilité d'ingénieur chimiste, je me dois de te demander de réviser d'urgence ta physique de Math Sup.

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Lun 27 Juil, 2009 19:35
de Muskull
Alexandre a écrit:Parce qu'il en va de ma crédibilité d'ingénieur chimiste, je me dois de te demander de réviser d'urgence ta physique de Math Sup.

Je crains de n'avoir jamais dépassé la Maternelle Supérieure. :lol:
Et dans cette classe je n'ai jamais vu ni entendu un "ingénieur chimiste" venir nous expliquer les valeurs de la "psychologie des profondeurs" chère à Jung, Freud, Lacan, etc...
Si ce fabuleux "ingénieur chimiste" veut bien contrecarrer mes opinions quand à la physique quantique je suis toutes ouïes. :shock:

P.S. un ingénieur chimiste qui ne crée comme molécule nouvelle que son propre égo c'est lassant, il doit y en avoir des milliers de part notre monde.

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Lun 27 Juil, 2009 20:20
de Sedullos
Salut à tous,

André-Yves a écrit:L'hypothèse est hardie et me paraît - plus encore que mes propres objections à l'approche comparatiste telle que décrite par Alexandre, validée par Patrice, encouragée par Sedullos - souligner le risque de biais méthodologique de cette approche.


André-Yves, comme je te l'ai dit, dans un MP, je défends le principe de l'approche comparatiste.

Concernant le contenu, c'est autre chose : Le Braz est un folkloriste, un collecteur mais aussi un auteur littéraire et un romancier. La question s'est posée pour moi lorsque je travaillais sur Kerys.
Comment faire la part de la création individuelle ? Joël Hascoet, qui a lu mon mémoire, est allé beaucoup plus loin et beaucoup plus juste, en partie parce qu'il a pu avoir accès, merci Internet, à une documentation qui m'était inaccessible matériellement à l'époque.

Un rappel : Marcel Granet disait à Dumézil : "La méthode, c'est le chemin une fois qu'on l'a parcouru !"

Il faut prendre cela, non pas comme une incitation à écrire tout et n'importe quoi, mais plutôt comme un encouragement. Ne pas verrouiller en somme en décrétant que tel type de recherche ou tel chercheur ne peut pas travailler sur tel ou tel sujet.

Après tout cela, je rejoindrais Patrice, une chanson parfois est seulement une chanson.

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Lun 27 Juil, 2009 23:03
de André-Yves Bourgès
Sedullos a écrit:Concernant le contenu, c'est autre chose : Le Braz est un folkloriste, un collecteur mais aussi un auteur littéraire et un romancier. La question s'est posée pour moi lorsque je travaillais sur Kerys.
Comment faire la part de la création individuelle ?


Bonsoir Sedullos,

C'est exactement ce que je posais comme question préalable sur le fil de discussion intitulé "le dragon hédoniste" ; Alexandre, qui, dans son son propre ouvrage,avalise sans les discuter les conclusions de Bernard Sergent, a bien voulu apporter une réponse générale sur le comparatisme, dont Patrice a vigoureusement résumé la méthode : "Bernard Sergent a appliqué une méthodologie classique en matière de comparatisme, à savoir qu'on se fiche pas mal de la date à laquelle un texte a été mis par écrit car on sait, depuis longtemps, que des contes oraux peuvent parfois se montrer plus archaïques que leurs versions antérieures écrites".

Or, en l'espèce, le "conte oral" supposé le "plus archaïque", c'est la version de la "légende" donnée par Le Braz, "objet littéraire" sorti de la plume d'un écrivain dont les travaux de collecte ont été vivement critiqués pour leur manque de rigueur, notamment, de son temps même, par Luzel, Gaidoz, Dottin, ....

Aujourd'hui encore, Alain Tanguy, ethnologue de formation, qui a entrepris la publication des carnets de Le Braz est obligé, malgré son intérêt pour le travail de collecte de l'écrivain qui le pousse à en minimiser les défauts, de signaler dans son article "La Quête d'un folkloriste à la lumière de l'ethnologie : Anatole Le Braz et les saints bretons" que ce dernier "a parfois remanié, "littérarisé", les données que lui fournissaient ses carnets".

Ainsi, nous ne sommes même pas sûr d'entendre la vox populi en lisant la version de Le Braz : ce biais me paraissait devoir être souligné ; à l'inverse, il me semble qu'une prise en compte de l'ensemble des pièces qui, sur un long terme, sont venues former le riche dossier littéraire de saint Efflam pourrait aboutir à des conclusions intéressantes et, à mon avis d'historien, moins discutables. D'autant qu'en l'espèce, la contribution de Le Braz emmêle les fils de deux traditions hagiographiques distinctes, celle de saint Efflam et de sa femme Enora d'une part et, d'autre part, celle de sainte Azénor (en breton Enori), fille du roi de Brest et mère de saint Budoc. J'ai parlé un peu de la première de ces traditions dans de courtes notules accessibles en ligne ici, et surtout dans un travail consacré à "La production hagiographique du scriptorium de Tréguier au XIe siècle : Des miracula de saint Cunwal aux vitae des saints Tugdual, Maudez et Efflam", Britannia monastica, n°9 (2005), p. 55-80. L'autre tradition a également fait l'objet d'un rapide examen ici et, de manière plus approfondie, dans l'étude sur "Les origines fabuleuses de la famille Du Chastel", Le Trémazan des Du Chastel - du château-fort à la ruine. Actes du colloque, Brest, juin 2004, sous la direction scientifique d'Yves Coativy, Brest-Landunvez, 2006, p. 29-44.


Cordialement,

André-Yves Bourgès

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Lun 27 Juil, 2009 23:56
de Sedullos
J'aurais dû ajouter à propos du corpus de la ville d'Ys que c'est Emile Souvestre qui me posait le plus de soucis tant sa version fourmille de détails littéraires et demeure incontournable pour l'étude de la légende.

Quant à St Efflam, je reconnais que je connais très peu ce personnage, je suis plus familier avec les vies de Corentin, Gwenole et Ronan, à cause de Kerys.

Pour revenir au Loup, au Renard et à la Belette..., il me semble qu'il existe plusieurs versions québécoises et acadiennes de cette chanson.

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Mar 28 Juil, 2009 0:11
de Sedullos
Pour Mia,

Je viens de consulter Traditions populaires de Bretagne, Du coq à l'âne de Daniel Giraudon chez Armen. Rien sur la belette mais deux chapitres sur le Loup et le Renard avec l'influence manifeste du Roman de Renard.

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Mar 28 Juil, 2009 9:00
de André-Yves Bourgès
Sedullos a écrit:Quant à St Efflam, je reconnais que je connais très peu ce personnage, je suis plus familier avec les vies de Corentin, Gwenole et Ronan, à cause de Kerys.


Pour une approche des circonstances de la composition des pièces anciennes des dossiers hagiographiques de Ronan et Corentin, voir ici et . Naturellement ces travaux sont très redevables à B. Merdrignac et au regretté H. Guillotel.

AYB

Re: Le Loup, le Renard et la Belette

MessagePosté: Mar 28 Juil, 2009 9:09
de André-Yves Bourgès
Sedullos a écrit:Pour Mia,

Je viens de consulter Traditions populaires de Bretagne, Du coq à l'âne de Daniel Giraudon chez Armen. Rien sur la belette mais deux chapitres sur le Loup et le Renard avec l'influence manifeste du Roman de Renard.


Le bestiaire hagiographique de saint Hervé et de plusieurs autres saints bretons intègre le loup et le renard : voir la seconde partie de l'étude en ligne ici, qui a paru originellement dans Britannia monastica, n°7 (2003), p. 75-97.

AYB