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Démystification de la pseudo-Brocéliande de Paimpont.

MessagePosté: Ven 25 Mar, 2005 10:07
de Marc'heg an Avel
Voilà, j'ai presque terminé la restauration de la publication d'Emgann Karaez / Bataille de Carohaise sur Internet.

(désordres dûs à un gros beuk de l'été 2004 !)

Je peux donc redonner ici les liens sur les pages concernant Raoul de Gaël et de Paimpont.

http://marikavel.org/carohaise/carohaise-chap7-1-raouldegael.htm

NB : les dragons rouges sont des icones actives qui mènent aux pages précédentes et suivantes.

Des photographies viendront ensuite.

JCE :)

MessagePosté: Ven 25 Mar, 2005 14:07
de Taliesin
Demat d'an holl !

Question : Ralph the Staller et Raoul de Gaël sont ils le même personnage ?

Voici ce que dit Paul Jeulin sur la constitution de l'honneur de Richmond ( AB, XLII, 1935) :

"Au cours du siège d’York, avant Noël 1069, au plus tard en 1071, sur les instances de la reine Maud, Alain le Roux (note : l'un des fils d'Eudes de Penthièvre) reçoit des mains du roi l’ « honneur » de Richmond que le souverain crée pour protéger le Yorkshire contre les attaques des Ecossais dans le Nord.
L’ « honneur » se compose d’abord des terres prises sur Edwin, rebelle réfugié en Ecosse. Ces terres sont situées dans le North Riding du Yorkshire. Ensuite, en 1075, les domaines confisqués à Ralph the Staller et situés dans les comtés de Lincoln, Norfolk et Suffolk viennent s’y ajouter.
A l’époque du Domesday Book (1086), l’honneur de Richmond porte sur 11 comtés anglais et constitue le plus grand « honneur » d’Angleterre » après celui du comte de Mortain, demi-frère du Conquérant."

MessagePosté: Lun 28 Mar, 2005 19:27
de Taliesin
Demat JC :D

J'avais aussi des questions plus générales sur Emgann Karaez :

Sur quels romans médiévaux arthuriens s'appuie Jacques Boulanger pour sa reconstitution/traduction ?

Pourquoi la Bataille de Carohaise ne figure-t-elle dans la liste des batailles livrées par Arthur dans l'Historia Brittonum ? Pourtant, l'oeuvre compilée par Nennius était connue en Bretagne armoricaine dès la fin du 9ème siècle, comme en témoigne le manuscrit Z de Chartres, composée par un moine breton armoricain. De plus, les traditions et les légendes étaient communes et partagées entre Bretons insulaires et continentaux, au moins jusqu'au 10ème siècle et les invasions normandes.

Cette bataille ne figure pas non plus chez Geoffroi de Monmouth, alors qu'il s'est très certainement inspiré, sinon de textes, du moins de traditions orales en provenance de Bretagne armoricaine.

MessagePosté: Mar 29 Mar, 2005 9:41
de Marc'heg an Avel
Salut TALIESIN,

Je t'avais dit que je te voyais venir. Voilà donc qui est fait ! :)

La question des sources de Jacques Boulenger a déjà été évoquée ici, par Patrice, et c'est la question qui m'est posée de façon quasi rituelle.

Et il est vrai que les sources de Jacques Boulenger constituent une énigme dans l'énigme, puisque je n'y ai pas eu accès, bien entendu.

Ce qui cause la surprise des lecteurs, c'est la précision des recoupements de chronologie, des personnages, et des lieux.

A ma connaissance, il n'y avait pas eu auparavant d'analyse systématique en profondeur de ce thème, puisque la quasi totalité des gens sont persuadés qu'il n'y a pas d'histoire authentique sous cette légende.

Comment donc arriver à une telle précision dans la date et dans l'identification de Jules César, d'Adrien de Constantinople ... et de Ponce Antoine ?

Je l'ai dit dans mon introduction : certains avaient (et ont peut être encore !) des doutes sur ma santé psychique ! (un peu trop d'avoine, peut-être, quand j'étais jeune ? ).

Mais ce qui m'amuse, dans le fond, c'est que, même en disant que ce n'est que de la légende, on n'arrête cependant pas de rechercher les localisations des lieux qui par conséquent, ne devraient pas exister, et de se disputer sur leurs identifications.

Lorsque j'avais pris contact, avant de publier mon étude, avec le Centre de l'Imaginaire de Comper, Claudine GLOT m'avait rétorqué : "Ha bon, car vous prenez le texte à la lettre ? Mais ce n'est que de la légende. "

Ce qui ne l'a pas empêchée, lorsque le docteur Edmond REBILLE lui avait dit que j'avait peut-être identifié la vraie Brocéliande, de lui poser alors cette question révélatrice du fond de sa pensée : "Y a t'il une chapelle ?".

Ben oui, j'ai la chapelle. Et j'ai même la fontaine, qui curieusement, s'appelle Liors ar Comper, comme le nom même du château dans lequel se trouve le Centre de l'Imaginaire arthurien.

Cherchez l'erreur ... ou la mystification !

Quant à Carohaise, si elle n'est pas citée dans les victoires d'Arthur, c'est tout simplement parce que :

- toutes les victoires d'Arthur citées se trouvent en Grande Bretagne. Ceci tend à démontrer, justement, que Carohaise n'est pas en Grande Bretagne et que, comme le dit le texte de Boulenger, il faut traverser la mer.

- cette bataille n'est pas LA victoire d'Arthur, même s'il y a participé, mais celle de Léodagan et de ses alliés, y compris Ban de Benoïc et Bohor de Gannes. Or, pour Benoïc et Gannes aussi, il faut traverser la mer.
De plus, Arthur se trouvait incognito à Carohaise, et il est clair que Léodagan, Ban et Bohor n'étaient pas ses sujets.

- et que la racine du nom de la Carmélide se trouve dans le nom de Maël-Carhaix ( Medle > Mezle > Mel), sur le territoire de laquelle passe un tronçon de l'aqueduc.

Je ne vai pas redonner ici l'intégralité de l'étude.

Mais je peux quand même rappeler le cas de Bourges, déjà objet de bataille entre Britto-romains et Wisigoths à Déols en 469, et la famille des Pontii de Bourg sur Gironde, amie de Sidoine Apollinaire, et néanmoins dans la mouvance des Wisigoths de Toulouse, ceux qui ont voulu à la fois soumettre Clermont Ferrand et l'Auvergne et les Brittones super Ligerim sitos.

Je sais qu'il faudra du temps à beaucoup de lecteurs pour comprendre que sous cette légende, il y avait bel et bien une réalité historique, et qu'il en ont déjà une partie de la réponse.

JCE :)

MessagePosté: Mar 29 Mar, 2005 17:55
de Taliesin
Demat JC :D

Je ne demande pas de sources historiques, mais littéraires. Ainsi, on connaît très bien les oeuvres à partir desquelles Bédier à écrit son roman de Tristan et Iseut au début du 20ème siècle.
Plus précisément, dans quel roman arthurien médiéval se trouve mentionné une bataille de Carohaise à laquelle participe Arthur ?

Car, dans le cas où Boulenger ne donne aucune source, je peux très bien supposer que cette bataille de Carohaise est celle qui se trouve dans les différents romans de Tristan du 12ème siècle, et que Boulenger a tout simplement remplacé Arthur par Tristan, ou bien qu'il a arrangé comme il a voulu différents épisodes de la légende.

Les écrivains médiévaux ont, dans la plupart des cas, donné leurs sources, avérées ou non, pourquoi un écrivain contemporain ne le ferait-il pas ?

MessagePosté: Mar 29 Mar, 2005 22:25
de Taliesin
ça y est, j'ai retrouvé la source ! :D

"..., Jacques Boulenger, reprenant comme support le Cycle de Lancelot, oeuvre collective du début du XIIIe siècle, a accompli un acte de création véritable loué par le célèbre médiéviste Joseph Bédier.
Des textes indépendants, ayant un sujet propre, mais liés par une idée directrice, la Quête du Graal, constituent ce fameux Cycle de Lancelot qui fut rédigé par plusieurs écrivains de 1210 à 1230."

C'est la Vulgate, ou le Lancelot en prose, véritable "usine à gaz" qui s'inspire de Robert de Boron.

Premières constatations : c'est un récit relativement tardif (il vient après Geoffroy de Monmouth, Wace, Thomas, Beroul, Chrétien de Troyes,...etc), c'est une oeuvre collective, et c'est déjà un remaniement et une recomposition des précédents romans.

Pas facile de discerner à quelle moment la bataille de Carhaix est entré dans la légende arthurienne.

MessagePosté: Mar 29 Mar, 2005 23:09
de Marc'heg an Avel
"... Pas facile de discerner à quelle moment la bataille de Carhaix est entré dans la légende arthurienne"

J'ai mis en gras une partie de phrase qui me semble une révélation !

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Il est parfaitement vrai que les sources de Jacques Boulenger peuvent être discutées, voire controversées.

Mais ce qui ne le peut pas, c'est :

- que Jules NEPOS était "césar" = vice empereur en 474, année dans laquelle le 30 avril tombait un mardi, quand Ariadne était impératrice à Constantinople, que Simplice était pape, etc ...

- que Brécilien se trouve tout près de Saint Symphorien, source pérenne de l'aqueduc romain de Carhaix, que saint Symphorien est le remplaçant de Cybèle, qui est Copia = la Coupe,

- qu'il s'y trouvait une chapelle près d'une fontaine,

- qu'en latin la prise d'eau d'une nappe phréatique s'appelle un calix, etc ... (voir Frontinus : De aquae ductibus / Traité de aqueducs romains)

- qu'il ne faut pas plus d'une demi-heure à un cavalier pour aller de Carhaix à Brécillien par les voies romaines qui les relient directement.

... etc ...

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En fait, la question n'est même plus de savoir si c'est la bonne corrélation, puisque aucune autre réponse ne peut apporter autant d'éléments convergeants.

La question est de savoir comment tout cela a fait pour devenir une légende.

Comment Boulenger a t'il pu décrire quelque chose d'aussi précis, des point de vues historique, chronologique, et géographique, mais qui n'a pas été compris ensuite, si tant est qu'il l'avait compris lui-même, alors que les preuves étaient (et sont toujours) matérielles et vérifiables !?

De l'énigme de Brocéliande, nous passons donc à l'énigme des sources de Boulenger, et à celle des déviations légendaires des autres commentateurs, y compris des historiens actuels.

Mais une chose est certaine et acquise : Brocéliande et Carohaise sont bien réelles, et non simplement "imaginaires".

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A chacun son graal !

Pour ce qui me concerne, je sais où se trouvait le calix de la principale source de l'aqueduc de Carhaix.

Comme l'avait dit mon ami Youenn JEZEQUEL, professeur et amateur informé de la tradition arthurienne :

"Si ça se trouve, l'énigme du Graal va se résoudre par une simple question de plomberie" (SIC).

JCE :)

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 0:06
de Taliesin
Atressì com Persavaus 1
El temps que vivia,
Que s’esbaït d’esgardar
Tant qu’anc non saup demandar
De qué servia
La lansa ni’ l grazaus,
6

De même que Perceval
Du temps où il vivait,
Fut si troublé par sa contemplation
Que jamais il ne sut demander
A qui servait
La lance et le graal

Poème de Rigaut de Barbezieux, troubadour charentais qui écrivit à priori entre 1140 et 1163. Cest la première mention du mot "graal", qui fut d'abord un nom commun :

"le terme de « Graal » désigne une écuelle au sens médiéval du mot, et non un vase liturgique. Selon la définition donnée par Hélinand de Froidmont au début du 13ème siècle, un graal est beaucoup plus large que profond. C’est un plat large et creux utilisé pour un service de bouche, il ne correspond en aucune façon à un ciboire ou un calice."
Jean Frappier - Chrétien de Troyes, p. 187

Le terme liturgique "calice" a été introduit par les moines de Glastonbury à la fin du 12ème siècle.

Comment expliques-tu que de "calix" au 5ème siècle, on soit passé par "graal" pour revenir ensuite à "calice" ?

Enfin, que fais-tu de Peredur ab Eliffer Gosgorddvawr (à la grande suite, ou au grand cortège), qui fut tué à la bataille d’Arfderydd (Nord de la Grande-Bretagne) entre 574 et 580 ?

A noter : les noms d'Eliffer et d'Arfderydd se retrouvent dans le dialogue entre Merlin et Taliesin, dialogue qui mentionne aussi Maelgun, roi de Gwynedd, Gowanon, et la forêt de Celydon (coet Keliton)

Bref, on ne sort pas du vieux Nord. C'est de là que partent pratiquement tout les récits et légendes qui formeront la matière de Bretagne, après avoir reçu des influences irlandaises, s'être arrêté au pays de Galles et en Cornouailles, et bien sûr après avoir traversé la mer de Bretagne (Mor Breizh), je veux dire la Manche, pour passer en Bretagne armoricaine.

En évoluant dans le temps, ces légendes vont se regrouper, se mélanger. Ainsi, si il y a jamais eu un Arthur, un Tristan ou un Peredur historique, on est sûr d'une chose : à l'origine, ils n'ont pas pu se rencontrer. Pourtant, c'est ce qui va se passer dans les légendes, parfois même avant la transmission de la matière de Bretagne aux anglo-normands. Alors imagine au 13ème siècle, ce qui a pu être ajouté, modifié, rallongé. Je ne parle même pas des personnages plus ou moins contemporains des écrivains des 12 et 13ème siècle qui vont se retrouver dans le bain eux aussi (Hoël de Cornouaille par exemple).

Alors, il y a peut-être bien eu une bataille de Carhaix (le roman de Tristan en parle aussi), mais, à mon avis, elle ne concerne pas Arthur : je pencherais plutôt pour un évènement historique plus récent ajouté à la légende par les Bretons armoricains. Mais bon, ce n'est qu'une hypothèse :wink:

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 9:29
de Marc'heg an Avel
Salut,

Pour calice et graal, nous sommes entièrement d'accord : ce sont des noms tout à fait communs désignant des choses concrêtes.

J'ai donné les explications dans l'encyclopédie qui accompagne l'étude. Je suis presque arrivé au bout de la restauration du site. On peut y accéder directement par la page du sommaire, en activant un lien en bas de page.

Le calice devient un objet sacré dès lors qu'il a été touché par le Christ. De même, le graal objet devient le Saint-Graal en littérature dès lors qu'on dit que ce fut le calice qui a servi de coupe pour recueillir le sang du Christ. Mais ce Saint-Graal là n'est qu'une invention littéraire et mystique.

Quant au mot Calice, dans le sens objet sacré, il a été introduit en même temps que le rite de l'élévation, par le pape qui était en place au moment de la 3ème croisade :

en levant la coupe et l'ostie au-dessus de la tête en direction du ciel (rite d'adoration) : "Que chacun voit Ton Calice".

Je l'ai aussi expliqué en donnant les références : toute divinité antique avait son calice, c'est à dire son principe sacré, principe impalpable.

C'est ainsi que Cybèle était qualifiée de Copia : La Coupe, et que c'est le mot calix (plur. calices) qui désignait le tuyau de la prise d'eau d'un aqueduc, dont elle était le symbole en tant que Mère.

Cette eau était ensuite recueillie dans un cratère, avant d'être dirigée vers le ruisseau ou l'aqueduc.

Nous avons là tous les ingrédients : coupe, calix, cratère.

J'ai une photographie d'un calix découvert en Grêce. Mais comme elle n'est pas de bonne qualité, je vais en faire venir une autre.

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Pour ce qui concerne le personnage Merlin, j'ai déjà dit que je considère deux époques et deux personnages différents, qui dans la Légende, ont été agglutinés pour n'en faire qu'un seul

- un Merlinus (dont le nom peut évoquer un prénom latin Falco, par le biais du nom de l'oiseau merlin falco colombarius), magister equitum = général en chef des armées britto-romaines de la fin du Vè siècle,

- un Martinus, poète, vivant un siècle plus tard.

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De toute façon, la présence de Ponce Antoine dans le texte démontre bien qu'il s'agit d'un évènement sur le continent puisque, comme par hasard, on apprend dans le même temps que Sidoine Apollinaire était ami de cette famille de Bourg sur Gironde, et que les tentatives d'Euric contre Clermont-Ferrand sont concommitantes aussi de Jules NEPOS, césar (Jules LE césar > Jules César !).

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PS : je viens de rescanner le tableau synoptique de façon à ce qu'il soit plus lisible.

http://marikavel.org/carohaise/carohaise-synoptique.jpg

à +

JCE :)

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 15:17
de Taliesin
Salut JC !


Pour Merlin, il y a effectivement deux personnages : Merlinus Ambrosius, ou Myrddin Emrys, et Merlinus Sylvester, Myrddin Wyllt. Ce dernier se rattache à l’irlandais Suibne et à l’écossais Lailoken. Le premier a été confondu dans la légende avec le personnage historique Ambrosius Aurelianus, ou Riothamus.

D’après Fleuriot, Les origines de la Bretagne :

Ambrosius serait né vers 410-420. Il s’oppose à Vortigern et doit un moment se réfugier en Armorique. Il triomphe ensuite de Vortigern et prend la tête de la résistance contre les Saxons (460-469). En 469, l’empereur Anthémius sollicite les secours des Bretons contre les Goths, car les Francs semblent avoir rompu leur alliance avec Rome (entre 465 et 468). Ambrosius débarque avec 12 000 hommes, sans doute en Basse-Loire, et se fait battre à Déols par Euric en 469. Il se réfugie alors chez les Burgondes. Il s’y trouve début 470, quand Sidoine lui écrit. Fleuriot pense qu’ensuite, Ambrosius a combattu à côte de Syagrius pour soumettre les Francs. Pendant 25 ans, les Bretons vont remplacer les Francs dans le rôle d’alliés des Romains. Ceci explique la durée insolite du « royaume de Syagrius » (464-486), car il pouvait compter, à l’ouest de la Seine, sur l’alliance d’un chef britto-romain, et au nord, sur celle de l’ensemble de la Grande-Bretagne. Cela explique aussi pourquoi, dans la version irlandaise de l’Historia Brittonum, Ambrosius est qualifié de « roi des Francs et des Bretons d’Armorique ». A aucune période les Bretons n’ont pu soumettre des Francs, sauf pendant le grand recul de Childéric de 465 à 481.
De plus, de 470 à 486, il existe une trêve de fait entre les Goths et les Romains du Nord de la Gaule, ce qui permet aux premiers de s’emparer de l’Auvergne, et aux seconds de repousser les Francs.
Ensuite, Ambrosius est probablement retourné en Grande-Bretagne pour combattre les Saxons.

Tout cela appelle un bon nombre de questions :

- Pourquoi Euric aurait-il attaqué les Bretons, allié des Romains, alors qu’il existait une trêve entre eux à ce moment ? Une attitude défensive sur la Loire était suffisante.
- Pourquoi trouve t-on un chef romain (Ponce Antoine) dans les rangs des ennemis d’Arthur alors que Bretons et Romains sont alliés contre les Francs ?
- Si on considère que le personnage de Merlin correspond dans ce cas à l’Ambrosius historique, comment aurait-il pu se trouver à Carohaise avec Arthur, alors qu’il se battait au même moment contre les Francs ?
- Enfin, comment croire qu’un roi aussi puissant et important qu’Ambrosius ne soit pas plus que le conseiller du jeune Arthur ?

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 16:38
de Marc'heg an Avel
C'est précisément après 469 que se crée la divergence d'avec Fleuriot.

Car Ambroise Aurèle, alias Riothame, après avoir été défait par Euric à Déols, rentre en Ile de Bretagne ... pour se faire empoisonner par les fidèles du clan de Vortigern, qui n'avaient pas oublié l'élimination de celui-ci dix ans auparavant, et qui n'attendaient qu'Ambroise se trouve en difficulté pour tenter de prendre leur revanche. Chose faite vers 470.

Donc, il ne peut y avoir confusion entre Ambroise Aurèle et Arthur, qui sont en fait oncle et neveu.

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L'histoire est formelle concernant l'attitude des Wisigoths.

Ceux-ci, obtenant le foedus avec un territoire allant de Toulouse à la Loire, ont, à plusieurs reprises, rompu ce foedus pour s'emparer progressivement des cités voisines, pour vouloir reconstituer sous leur loi l'ensemble de l'Aquitaine. Et à chaque fois, le pouvoir central, mis devant le fait accompli et devant son impuissance à y résister, a entériné les progressions territoriales des Wisigoths en accordant un nouveau foedus à chaque fois.

Ce qui n'empêchait pas l'Empire et les Wisigoths de s'entendre comme larrons en foire, tantôt du même côté, comme aux champs catalauniques, tantôt en se faisant la guerre, comme à Déols.

Et après avoir pris Bourges, leurs visées portaient désormais sur l'Auvergne, jusqu'au Rhône, et sur le nord de la Loire.

Mais sur le Rhône, ils se sont frottés aux Burgondes, et sur la Loire, ils se sont frottés aux Gaulois armoricains, aux Britto-romains installés là depuis le Tractus aremoricus, et aux Francs installés en Gaule belgique.

En fait, c'étaient des luttes d'influence entre forces composant l'échiquier politico-militaire de cet empire décadent du milieu du Vè siècle.

Et c'est pourquoi le cas de Ponce Antoine est explicite : une riche famille gallo-romaine d'Aquitaine, soumise, dans le cadre du foedus, à l'autorité des rois wisigoths, leurs suzerains de droit mis en place par le pouvoir central lui-même.

C'est pourquoi il y avait des "Romains" (en fait des Gallo-romains d'Aquitaine) dans les rangs wisigoths.

Il y avait aussi des Suèves et des Alamani, qui avaient été également absorbés par les Wisigoths. c'est pourquoi on trouve des "Allemands" dans les rangs des wisigoths, et que l'on parle de Matham de Souabe, déchu, déplacé et assigné à domicile sur ordre d'Euric à Montpellier.

Du reste, le cas de Sidoine Apollinaire est éloquent à ce propos.

Alors qu'il a vaillamment défendu Clermont contre les entreprises d'Euric, il a tout de même été livré, avec le reste de l'Auvergne, à Euric, par Jules NEPOS, alors auguste, dans le cadre du traité honteux de 475.

Et c'est là qu'on appprend qu'il a été contraint par Euric, son ennemi et désormais suzerain, de faire anti-chambre, chez ses amis les Pontii de Bourg sur Gironde, riches propriétaires fonciers, avant d'être reçu à Toulouse.

Et pire encore, c'est le propre fils de Sidoine qui commandait l'aile gallo-romaine de l'armée wisigothe à Vouillé, contre les Francs de Clovis.

Si on veut comprendre quelque chose à cette époque, il est impératif de lire les textes de Sidoine Apollinaire.

D'ailleurs, Sidoine parle du cas d'un jeune Aquitain, originaire de Clermont, se trouvant dans les lignes wisigothes, et "contraint malgré lui de tirer sur sa ville".

JCE :)

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 18:32
de Taliesin
Bon, reprenons :

Merlin, général en chef des armées britto-romaines, se confond dans la tradition avec Ambroise Aurélien, Riothamus.

Ce dernier serait mort empoisonné en 470.

Il ressuscite en 474 pour prendre part à la bataille de Carohaise avec Arthur.

Euuh, y pas un bug quelque part ?

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 22:04
de Marc'heg an Avel
TALIESIN a écrit:Bon, reprenons :

Merlin, général en chef des armées britto-romaines, se confond dans la tradition avec Ambroise Aurélien, Riothamus.

Ce dernier serait mort empoisonné en 470.

Il ressuscite en 474 pour prendre part à la bataille de Carohaise avec Arthur.

Euuh, y pas un bug quelque part ?


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NON,

Parce que l'identification Merlin / Ambroise Aurèle, ça n'est pas de moi !

Ambroise était une personne d'un âge très voisin de celui de Vortigern, et c'est la raison pour laquelle ils se sont trouvés en opposition politique, vers 425/430 environ, pour la désignation en tant que dux de Bretagne.

C'est Vortigern qui a été nommé, et Ambroise a quitté l'Ile pour se rendre apparemment à Bourges, en Gaule. (On comprend mieux ainsi son intervention ensuite, en 469).

Le Merlinus dont je parle, quant à lui, était le magister equitum d'Arthur, à savoir son général de cavalerie, c'est à dire son général en chef.

Plus âgé de 6 ans qu'Arthur, il était donc âgé de 24 ans environ en 474, ce qui le fait naître vers 450.

Ce qui me conforte dans l'idée que Merlin est resté plus tard en Petite Bretagne est cette allusion que beaucoup de chevaliers bretons, écoeurés de cette guerre civile interminable en G. Bretagne, se seraient résolus, en désespoir de cause, à quitter l'Ile pour venir sur le continent, politiquement plus calme et plus stable, même si cette notion doit être relativisée.

La Légende arrange cela dans le thème de la Prison d'air, qui serait un charme élaboré par Viviane pour retenir son amant.

La réalité est sans doute moins féérique, car la réalité géopolitique des Britto-romains de G. Bretagne, dévorée par les guerres de clans, était tout simplement suicidaire et ne pouvait mener qu'au désastre.

Merlin refuse de revenir dans l'Ile à l'appel d'Arthur; les chevaliers se battent entre eux; la reine trompe son époux ... etc

Bref : De Excidio Britonum : la Ruine de la Bretagne.

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ps : je ne retrouve pas le texte dans lequel il est dit :

"Pleurez, filles de Pengwern, car Emrys est mort".

Merci à qui me retrouvera ça.

JCE :)

MessagePosté: Mer 30 Mar, 2005 23:09
de Taliesin
"Parce que l'identification Merlin / Ambroise Aurèle, ça n'est pas de moi ! "

Je sais bien, elle vient de Geoffroi, qui s'inspire peut-être d'une identification déjà faite dans la tradition orale.

Ambrosius, ou Emrys Wledic est l'enfant devin sans père de l'Historia Brittonum compilée par Nennius.

Il serait donc plus jeune que Vortigern, et il répond à celui-ci que son père est consul du peuple romain, ce qui correspond à Gildas, qui dit dans l'Excidio que les parents d'Ambrosius Aurelianus avaient porté la pourpre.

MessagePosté: Jeu 31 Mar, 2005 9:12
de Marc'heg an Avel
Ca tombe bien : je viens de restaurer la page des consuls depuis 432 :

http://marikavel.org/carohaise/carohaise-chap9-2-consuls.htm

S'il le faut, je peux remonter la liste jusqu'à Théodose Ier.

De toute façon, l'intervention d'Ambroise en G. Bretagne a suivi la deuxième défaite des Britto-romins contre les Jutes, cette fois ci soutenus par les Saxons fédérés de GB, à Crayford, datée de 455-456.

C'est dans ce couple d'années là qu'il faut placer la conception d'Arthur, qui serait donc né soit en 455, en 456, ou en 457.

On ajoute à celà 16 ou 18 ans, âge qu'il a à Carohaise, et on tombe effectivement sur 474, année dans laquelle 30 avril tombait un mardi, et où Jules NEPOS était césar = vice empereur.

Si on ajoute 76 à l'une de ces dates de naissance possible, on tombe tout près de 532, date donnée pour Camlann et de la mort d'Arthur.

JCE :)