castille a écrit:Le 20/11/2003 à 13:10 par castille http://forum.arbre-celtique.com/viewtop ... 5335#15335Chers amis, voici un sujet de recherche que j'ai proposé aux adhérents de la société de mythologie française Ile-de-France (lettre 47 juillet-août-septembre). Cet article ne comprend pas les développements ultérieurs, ce n'était en quelque sorte qu'un "avis de recherche".
LE UN EN TROIS CHEZ LES CELTES.
L’unité en trois chez les celtes a été signalée à maintes reprises par des auteurs comme Loth, Déchélettes, Renel ou Vendryes qui étudièrent les littératures celtiques au sein de l’illustre Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Je porte à la connaissance de nos membres la communication donnée par Vendryes à la séance du 5 juillet 1935 devant la dite académie qui portait sur l’unité en trois personnes chez les Celtes.
Après un long préliminaire sur l’importance du nombre trois dans de nombreux pays et plus particulièrement en Irlande au travers des textes et autres récits de l’épopée irlandaise, Vendryes se penche, pour terminer sa communication sur les traditions et les légendes de la Gaule dans lesquelles le vieux thème du personnage tricéphale revient fréquemment et dont l’iconographie de la Gaule recèle bien des représentations.
La religion des Gaulois a depuis longtemps retenu plus particulièrement toute l’attention des archéologues et nombre de monuments figurés se retrouvent dans des répertoires comme celui dressé par Espérandieu dont les volumes II, III, IV, V, VI, et IX sont particulièrement illustrés des trouvailles archéologiques.
Il semble que la région de Reims détienne le record des découvertes du dieu tricéphale.
Les monuments à trois visages présentent tantôt trois faces complètes autour d’un même bloc, tantôt une face centrale à laquelle sont juxtaposées deux moitiés de faces, chacun des deux yeux centraux faisant paire avec un autre œil situé sur le côté, ce qui est le cas du monument retrouvé à Reims représenté ci-dessus.
Les monuments à trois têtes se subdivisent en deux séries, la première un dieu à trois visages partant d’un même cou et la seconde dont la tête centrale est figurée avec deux plus petites têtes collées à la hauteur des oreilles, à niveau égal ou différent.
Il ne semble pas qu’il y ait de différence entre les représentations dans leur conception mythique, tout au plus une approche différente dans l’exécution du monument.
Certains érudits ont contesté une origine celtique à ces curieux monuments, d’autres sont convaincus du caractère indigène de ceux-ci. Ce caractère indigène se trouve renforcé par le simple fait que ces représentations existent dans certaines régions de la Gaule et pas ou très peu dans d’autres. La plupart sont de provenance septentrionale et une bonne quinzaine de ces dieux tricéphales a pour origine le territoire des Rémi. L’étude de ces dernières permet de dire que ce sont là des représentations archaïques du dieu tricéphale.
Pour Joseph Vendryes « il est impossible de dire si la figure tricéphale représente une même divinité honorée chez divers peuples de la Gaule, ou si plusieurs dieux différents se cachent sous une même représentation » car parfois la figure est tantôt imberbe, tantôt barbue.
« Une chose est certaine, ajoute Vendryes, c’est qu’un dieu tricéphale était chez les Rémi en particulier honneur ».
Deux stèles retrouvées à Metz et à Trèves offrent une disposition contraire. En effet le monument tricéphale chez les Treueri montre une opposition de culte. Le personnage tricéphale est en effet foulé aux pieds par les Matres de Trèves où leur culte était à l’honneur. Je pense qu’il devait exister une sorte de rivalité cultuelle entre les deux tribus.
Ces éléments que nous venons de survoler permettent de croire, que ce soit au travers des représentations figurées ou au travers des textes irlandais « à l’existence chez les Celtes, d’une conception mythique suivant laquelle un même être, unissant trois individus en sa personne, était en même temps le dieu protecteur, peut-être le chef ou en tout cas le symbole de la tribu » (Vendryes).
Pour la petite histoire rappelons que le dieu tricéphale se retrouve dans l’Inde védique ainsi que dans l’art chrétien. Somme toute une universalité du symbole.
Et Vendryes de conclure « que ce personnage se laisse interpréter comme l’incarnation de l’être triple en un, qui a été reconnu comme appartenant au vieux fonds de la mythologie celtique ».
Omnia solus et ter unus.
Chers amis celtisants voilà une recherche à approfondir en n’oubliant pas l’importance du nombre trois chez les Celtes, alors à vos plumes et autres calames.
Etude 2003 CASTILLE Daniel