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Organisations trinaires et tripartition...

MessagePosté: Ven 02 Jan, 2004 13:28
de Muskull
Fergus a écrit :

Dumézil et ses théories ne sont pas des dogmes intangibles, mais une longue esquisse de tentative d'essai d'ébauche de doctrine explicative de certaines ressemblances structurelles dans des traditions différentes. Il a remarqué que ces structures existaient principalement chez des peuples qui parlent des langues indo-européennes.
Maintenant, que des pistes n'aient pas été explorées, ou pas assez, ou que des choses soient apparues récemment à la faveur de recherches, pourquoi pas ?
Il faut être ouvert à toute nouveauté scientifique, et si des structures trifonctionnelles semblent exister ailleurs que dans le monde indo-européen, explorons-les, tentons d'en déterminer une éventuelle généalogie, qu'elles trouvent leurs origines dans le monde indo-européen ou non.
A quoi penses-tu en particulier ?


C'est un sujet très vaste...
Mon propos n'est nullement de remettre en cause les analyses de Dumezil, ce qui serait stupide ; mais comme le dit Fergus, d'élargir le champ d'analyse afin de voir s'il ne s'agit pas, en fait, d'un mythe universel qui a prit une coloration spéciale dans le monde indo-européen.

C'est un peu prétentieux de lancer ce sujet au vu de mes connaissances personnelles mais bon, qui ne tente rien n'a rien et ce débat peut être fructueux. :wink:

Le trinaire, symbole naturel.
De très nombreuses cosmologies évoque ce triangle créateur où la vie jaillit de la dualité : Le germe qui brise l'unité de la graine, l'enfant qui naît du couple quand il s'unit, etc...
Ces trois aspects de la manifestation du vivant se sont trouvés personnifiés dans de très nombreux mythes avec plus ou moins de spéculation philosophique.
Celui des jumeaux célestes est quasi universel, l'un est mortel et l'autre immortel comme, pour sortir du domaine I.E., le mythe d'Isis et d'Osiris et celui d'Abel et de Caïn dans la Bible. Les sens sont très différents mais le trinaire est formé dans le premier par Seth, le destructeur et dans le second par le divin "qui agrée les offrandes"...

De même, l'on a retrouvé une déesse tricéphale datant de Sumer (pas retrouvé la photo :( ) et l'on sait que dans le temple de la Mecque, trois déesses étaient adorée avant l'Islam. L'une d'elle était Al Lat, la grande déesse phénicienne de l'antiquité.
L'on voit donc qu'à ce niveau la frontière entre I.E. et sémites est des plus floue.

Tout cela est un peu brouillon mais ça va se clarifier... :wink:

MessagePosté: Ven 02 Jan, 2004 16:56
de Muskull
D'après Jean Guilaine l'on ne peut parler de réelle "classe" guerrière avant la formation des cités états, c'est à dire de guerriers "à plein temps".

Les premières cités états sont nées en Mésopotamie, Palestine, Egypte, Indus, Chine, toutes liées à de grands fleuves.
Les historiens associent leur "invention" aux besoins collectifs liés, d'une part à la démographie de ces zones riches mais aussi à des incidences climatiques sur le long terme qui ont vu en parallèle de la désertification du Sahara, un assèchement général de ces régions.
Les intenses travaux d'irrigation demandant une organisation centralisé pour gérer le travail collectif en imposant des "corvées" et des impôts pour entretenir le personnel permanent qui s'occupait de ce système vital et aussi ceux qui le protégeait et coordonnaient les travaux.
Les premières milices et les premiers fonctionnaires. :D

Ces premiers "militaires" protégeait aussi les routes commerciales, parfois dans des avant-postes qui sont bien décrits dans l'archéologie mésopotamienne, aussi contre les revendications d'autres cités état sur des territoires ou sur un commerce privilégié...
Bref, z'étaient pas copains les voisins. :(

De fait, il paraît peu concevable que les gaulois aient eu une "classe militaire" avant la création des cités qui ont vu l'essor de regroupements d'artisans et d'une "aristocratie" qui avait tout pouvoir sur les circuits commerciaux et organisait ainsi la richesse de la cité et de la teuta, après la leur propre, évidemment. :D
Soit vers le II° siècle B.C.

Ces guerriers ne tombent évidemment pas de nues. L'insécurité des temps faisait qu'auparavant chaque homme robuste s'entrainait au maniement des armes en vu des "jeux" des grandes réunions annuelles.
D'après J. Guilaine, le culte du héros précède de beaucoup le temps des "militaires".

MessagePosté: Ven 02 Jan, 2004 18:08
de Sedullos
Muskull a écrit:D'après Jean Guilaine l'on ne peut parler de réelle "classe" guerrière avant la formation des cités états, c'est à dire de guerriers "à plein temps".

Les premières cités états sont nées en Mésopotamie, Palestine, Egypte, Indus, Chine, toutes liées à de grands fleuves.

D'après J. Guilaine, le culte du héros précède de beaucoup le temps des "militaires".


Salut, Muskull, le problème c'est que J. Guilaine méconnaît complètement l'originalité profonde des Indo-Européens, qui possèdent une classe guerrière, tout en étant des nomades ou des agriculteurs sédentaires qui mettront des siècles pour constituer des cités-états, des millénaires pour les Celtes d'Irlande.
M. Guilaine est un bon historien mais il très attaché aux schémas méditerranéens et sémites même si certains peuples sémites du proche-orient se situent entre les deux.
Sedullos

MessagePosté: Ven 02 Jan, 2004 23:16
de Fergus
Oui, Sed, je suis d'accord avec toi.
L'exemple de l'Irlande montre clairement une société trifonctionnelle bien avant la création de cités-Etats au sens méditeranéen ou mésopotamien.

MessagePosté: Sam 03 Jan, 2004 17:06
de Muskull
Ah mais ! Si vous croyez que je me laisser faire ! :wink:

Je pense que Tara peut être considérée comme une cité même si ce n'était pas une cité état à la mode mésopotamienne.

Je me pose simplement la question de savoir comment, avant les oppida, dans une structure sociale d'habitat dispersé, entretenir des militaires à plein temps.
Il est probable que dans les espaces les plus riches, proche des grands circuits commerciaux, comme les vallées alluvionnaires, il y ait pu avoir des milices pour protéger les biens et les personnes des convoitises de voisins plus mal lotis mais une véritable caste guerrière sur toute l'étendue du domaine celtique, ce serait surprenant.
L'on aurait retrouvé des formes de "casernement" adaptés à l'entraînement avec de grandes écuries, etc...
Or nous ne trouvons ce type d'architecture en Gaule qu'à partir du VI° siècle B.C. où de gros villages, centres commerciaux importants se ceinturent de remparts, vers le V° siècle, des forts apparaissent...

Dans les tombes princières du VII° / VI° siècle, l'armement est peu présent et surtout d'apparat.
Les historiens pensent donc que le V° siècle voit l'émergeance d'une élite ou le potentiel militaire s'affirme comme une référence dominante.

Au cours du IV° siècle, la proportion des sépultures contenant de l'armement vont passer de 5% au V°S, à 15% et même plus de 20% au début du III° siècle.

Je pèche certainement par manque d'information mais une certaine logique historique veut que l'apparition de militaires "professionnels" en Celtie date de cette époque... :?

MessagePosté: Sam 03 Jan, 2004 17:34
de mikhail
Muskull,

Prenons le contre(?)-exemple romain, mieux documenté : les quirites (disons : les citoyens de base) deviennent des milites (des soldats, des guerriers) suivant les nécessités des guerres. Il n'y a de "militaires de carrière" qu'assez tard, me semble-til ?
Qui pourra confirmer (infirmer ?) ou documenter cette impression ?

mikhail

MessagePosté: Sam 03 Jan, 2004 20:13
de Fergus
Muskull,

Deux choses :
1) L'idéologie trifonctionnelle ne signifie pas obligatoirement application à la réalité sociale. Dumézil lui-même précise à de nombreuses reprises que l'idéologie trifonctionnelle est une idéologie, et non une description fidèle de la société concernée.
2) Même dans le cas d'une application sociale, pourquoi y aurait-il des traces aussi durables, à grande échelle, que ce que tu dis ? Je conçois très bien une société nomade, à faible effectif, dont les membres seraient organisés en trois fonctions. Pas besoin d'immenses casernements. C'est une déformation "moderniste" (je veux dire : post-romaine, ou au moins méditerranéenne) que de vouloir absolument que toute civilisation se révèle par des traces en dur !

Mikhail
Prenons le contre(?)-exemple romain, mieux documenté : les quirites (disons : les citoyens de base) deviennent des milites (des soldats, des guerriers) suivant les nécessités des guerres. Il n'y a de "militaires de carrière" qu'assez tard, me semble-til ?

Bon contre-exemple : le fait qu'il n'y ait pas d'"armée" romaine de carrière dans les premiers siècles n'empêche pas l'idéologie trifonctionnelle d'être particulièrement documentée.

MessagePosté: Sam 03 Jan, 2004 21:47
de mikhail
Fergus Bodu a écrit:... une société nomade, à faible effectif, dont les membres seraient organisés en trois fonctions.

C'était presque le cas des Scythes.

A l'appui de cette discussion, il faut rappeler qu'à ces époques la chasse était une activité proche de la guerre ; pas plus que la guerre elle n'était le fait de "tout le monde", ce que l'on croit un peu trop.

Muskull,

Même si d'autres peuples ont compté par trois (leurs dieux ou autre chose) les Indo-Européens en ont fait le socle de l'ensemble de leur société : 3 familles pour échanger des jeunes à marier, panthéon religieux, mythes, etc.
Les Grecs de l'époque classique ont cru que cette trifonctionnalité leur venait des Egyptiens, dont ils connaissaient la plus grande antiquité politique et sociale ; en réalité les Egyptiens avaient reçu cette trifonctionnalité des Peuples de la Mer et du Nord qui les avaient envahis, des Indo-Européens.

De même, les Svanes, peuple non indo-européen du Caucase, ont mieux intégré la trifonctionnalité de leurs voisins les Ossètes, descendants des Scythes, que les Géorgiens.
Georges Charachidzé le montre de façon lumineuse dans son livre "La mémoire indo-européenne du Caucase", page 80 :
"Les religions polythéistes sont légitimement la proie d'un souci obsédant, d'une angoisse renouvelée lors de la plupart des célébrations : est-on assuré de n'avoir oublié personne, a-t-on bien convié ou nommé tous les dieux sans en négliger aucun, fût-il de médiocre extraction (songer à la mauvaise fée outragée) ?
Pour parer à cette menace quasi quotidienne, [...]
C'est pourquoi les religions recourent communément, à côté ou à la place de ces palliatifs, à des méthodes plus réfléchies. Il n'en existe en fait que deux, comme pour toute sommation destinée à parcourir la totalité d'une collection [..] : celle de la pure et simple énumération, où l'ensemble est traité en extension ; l'autre opérant plutôt en compréhension, par analyse et synthèse, définissant des catégories, distinguant et assemblant des groupes : elle se fonde sur la classification.
Les deux méthodes sont attestées dans le Caucase du Sud, chez les peuples qui furent au contact des Ossètes et de leurs ancêtres durant des siècles : les montagnards géorgiens à l'est, usent de la première ; les Svanes, à l'ouest, de la seconde. [..]
C'est une tendance de la pensée svane que de soumettre les objets traités à une analyse très poussée ainsi qu'à une forte concentration. Placés devant un même problème, Svanes et Géorgiens usent de méthodes presque inverses [..]
Les montagnards géorgiens ne s'embarrassent pas de philosophie analytique pour assembler leurs séries liturgiques. Ils bornent leur effort de mise en ordre aux deux premiers dieux invoqués [..] Mais cette troisième place n'est pas assurée, et peut se voir occupée par n'importe quelle autre entité. Au-delà, les dieux sont alignés pêle-mêle, sans qu'il soit possible d'y déceler le moindre principe de classement : d'où la longueur de ces dénombrements, censés passer en revue toutes les entités du monde divin. [..] Il faut se rendre à l'évidence : le seul principe de ces inventaires, consiste à faire le compte de tous les dieux, et ici addition vaut totalisation. La gande question est de n'en pas oublier : l'effort porte sur le bon focntionnement de la mémoire quantitative, non sur celui de la pensée.

[..] les Svanes s'ingénient au contraire à penser leurs dieux. Ce souci d'ordonner la matière religieuse est manifeste au moindre examen des textes : dès lors que plusieurs divinités sont réunies en une même circonstance, leur célébration s'organise en respectant un ordre dont le principe est transparent. [..]
L'essentiel consiste à célébrer les entités surnaturelles en vidant trois gobeltes ou coupes pour chacun d'eux :
- glorification des dieux [..]
- glorification des guerriers légendaires [..]
- les dernières libations s'adressent à la déesse Lamaria, qui patronne les femmes, les vaches et les produits laitiers, les céréales, assurant nourriture et abondance [..]
[..] il est permis d'affirmer que nous sommes là en présence d'une structure de type indo-européen, avec les trois fonctions se succédant dans l'ordre canonique : les dieux, les héros, l'abondance.
Georges Charachidzé, La mémoire indo-européenne du Caucase, Hachette 1987, 152 pages.
(l'italique est de Charachidzé)

Je me répète : les Svanes, qui ne sont pas des Indo-Européens, ont saisi dans la trifonctionnalité quelque chose qui allait dans le sens de leurs culture particulière, il l'ont intégrée dans un contexte non-indo-européen ; les Géorgiens, au fonctionnement culturel et mental tout autre, ont choisi la méthode "extensive", citer les "tous les dieux".

Par l'exemple de cette longue citation, je voudrais insister sur l'originalité, la particularité indo-européenne.
D'autres peuples ont compté ou comptent par trois, y compris les peuples christianisés, seuls les Indo-Européens ont fait de ce "trois" une structrue fonctionnelle sociale, politique, mythique, cosmique.

mikhail

MessagePosté: Mer 07 Jan, 2004 10:49
de Muskull
Du dualisme à la conceptualisation du divin.

"On ne peut remonter avant 50 000 ans, date des premières sépultures (Neandertal) et donc, sans doute du premier langage narratif (mythes). C'est aussi la naissance de l'homme moderne (sapiens sapiens) qui se caractérise par son expression artistique et une langue mère dont toutes nos langues dérivent. Il y a, de même, une continuité dans les thèmes religieux et artistiques de ces origines aux tribus contemporaines qui sont restées isolées de la civilisation (de l'Australie, à l'Amérique du sud jusqu'aux Inuits ou à la Sibérie).

Le culte des morts est le premier signe religieux. Témoin de l'opposition Nature/Culture, constitutive d'un monde humain, celui du langage et qui implique les structures élémentaires de la parenté codifiant les relations sociales ainsi que l'initiation qui marque la naissance à la culture et la fin de l'état de nature (deux fois né). L'unité de la communauté, identifiée à un dieu ou un totem, se constitue à travers les échanges de femmes et de biens (Dons ou Potlatch), dans le respect minutieux des rites et des traditions qui maintiennent l'ordre du monde, son équilibre fragile rétabli à coup de sacrifices, de danses, de prières, de formules. La conceptualité originaire (la pensée sauvage) est classificatrice avec un dualisme systématique (homme/animal, homme/femme, vie/mort, terre/ciel, réalité/rêve). C'est l'effet du langage qu'on retrouve jusque dans la dialectique dichotomique de Socrate.

Bien qu'ils supposent un seigneur des animaux (évoqué par le dieu à 3 visages de l'Indus/Rudra/Shiva) auquel ils doivent le renouvellement de leur subsistance à condition, par exemple, d'enterrer les ossements des animaux tués, il n'y a pas conception d'un être absolu qui serait par rapport au moi quelque chose de radicalement autre et supérieur, mais plutôt la conception de la nature comme un ensemble de forces qui sont à la disposition de l'homme (manger un animal est prendre sa force). C'est le règne de la magie, d'un rapport duel, imaginaire, entre deux esprits humains (Sorciers ou Chamans) qui peut prendre la forme dualiste de l'opposition du créateur et du destructeur. La magie est l'effectivité de la subjectivité sur la réalité extérieure.


- La Bonne Mère et le Taureau. Khiamien (-9500)

D'après Jacques Cauvin (Naissance des divinités, naissance de l'agriculture-CNRS) ce qui est caractéristique, c'est bien l'apparition de la nouvelle religion avant l'apparition des nouvelles techniques que ne justifiaient aucune nécessité naturelle mais seulement le prestige de la maîtrise, du progrès.
La nouvelle religion se caractérise par des figures en prière (les orants), les bras tendus vers le ciel (dans l'Enûma elis babylonien Marduk est célébré pour avoir "créé l'Incantation afin que les dieux s'apaisent" p646) ainsi que par des figurines représentant une déesse-mère, aussi terrible et capricieuse que le ciel sans doute ("c'était la Dame montée sur le puissant Aurochs céleste" comme est présentée Inanna à Sumer p27 Déluge descendant de sa montagne, Tu es la première, la déesse du ciel et de la terre), ainsi que des représentations du taureau que l'on retrouvera dans les religions cananéennes (Baal), Mésopotamiennes (Marduk), Égéenne (Minotaure) avec la pratique de corridas comme elles existent encore dans le sud de la France (sans compter l'Égypte et l'Inde). Ce taureau, plus tard chevauché par le dieu de l'orage hittite, est, comme Zeus, celui qui rétablit la prospérité et arrête le cycle des destructions. On le retrouve dans le boeuf Apis Égyptien (Ptah mais aussi Hator), la vache sacrée Indienne (et la Mère des Dieux Aditi puis la Grande déesse Kâli), les rites de Mithra, etc. Ce qui frappe c'est son apparition avant sa domestication, avant l'agriculture. La domination du culte par une déesse rappelle aussi les cultes plus tardifs, d'Isis, de Cybèle, de Démeter, déesses de la reproduction, de la renaissance, mais évoquant aussi l'Eve biblique par qui l'homme a goûté au savoir (ou la Pandore grecque). "

L'on peut voir dans ce mythème de l'homme intermédiaire entre les forces naturelles et un concept régulateur divin (qui doit être prié), la première trinité symbolique dont va découler les grandes religions. Dans les mythes archaïque, ce troisième terme peut être prêtre-roi ou héros...

Citations venues de ce site dont la synthèse est remarquable :
http://perso.wanadoo.fr/marxiens/philo/ ... ligion.htm

MessagePosté: Ven 09 Jan, 2004 9:30
de Muskull
Bonjour :)

Au vu de l'enthousiasme général :lol:

Une citation complémentaire du site précité :wink:

- La céramique, éleveurs nomades (-7500)

"Le nomadisme pastoral est plus tardif que l'agriculture et contemporain d'une virilisation des figures et de sanctuaires où s'effectuaient des sacrifices sanglants, y compris humains. C'est l'inondation du golfe Arabo-persique et la fin du déluge, le retour à un temps sec. C'est aussi l'époque du culte des crânes, qui sont détachés du corps, parfois modelés et coiffés, et qui sont exposés dans ou à l'extérieur des maisons carrées (Ka'ba) et non plus rondes. Cette pratique est sans doute à rapprocher des futures momies égyptiennes et du culte des ancêtres. On suppose aussi la pratique de banquets où se réunit la communauté.

Le nomadisme, amplifié par la nouvelle sécheresse, va accélérer l'expansion du néolithique, surtout en touchant des populations qui vont pouvoir passer directement du nomadisme de cueilleur-chasseur à celui d'éleveur nomade, préservant des éléments archaïques dans la nouvelle religion. Cette diffusion se fera en même temps que celle de la langue dite indo-européenne.

La religion de ces éleveurs nomades nous est en partie accessible par ce que nous savons des religions indo-européennes, bien que beaucoup plus tardives et qui se retrouvent de l'Inde à l'Iran, aux Scythes, aux Celtes, aux Slaves et aux Germains.
Ces peuples nomades devaient protéger leur bien, objet de convoitise, à moins qu'ils ne vivent de rapines comme les premiers grecs (d'après Thucydide) ou les premiers Romains, formant, donc, une classe de guerriers.
La prépondérance de l'homme dans cette organisation ainsi que l'attention de ces populations aux problèmes de reproduction s'exprime dans une religion patriarcale et le culte des héros. L'unité de la vie et de la mort (Si la mort sort de la vie, la vie en revanche sort de la mort. Hegel p62) est affirmée dans les cérémonies phalliques. Les initiations guerrières, les rites du Soma ou de l'Ambroisie donnent aux guerriers l'espoir de l'immortalité. Les sacrifices évoluent de leur fonction magique à un ritualisme formaliste qui se réduit à affirmer l'unité de la communauté ("ON DIT QU'ON S'EST INSTALLÉ LORSQU'ON A CONSTRUIT UN AUTEL" Satapatha Br. VII, I,I,I-4). Le banquet restera, chez les Grecs ou les Gaulois le rite principal de la communion.

On peut déduire qu'issues de la religion du taureau (Mithra) mais s'éloignant d'une culpabilité originelle, la religion se réduit au social, reflétant les fonctions efficaces de l'organisation de la société ; religion plus utilitaire, au service du pouvoir, et qui se renforcera de l'âge du bronze à l'âge du fer."


Je pense que ce court extrait offre une piste intéressante sur le particularisme des religions I.E.
N'oublions pas qu'au sommet du "panthéon" hittite il y avait LA déesse du soleil et LE dieu du ciel et de l'orage. :wink:

MessagePosté: Ven 09 Jan, 2004 9:40
de mikhail
Muskull a écrit:Bonjour :)
Au vu de l'enthousiasme général :lol:

J'ai parcouru, plus que lu, ta référence ; elle est fort longue, tu n'as laissé que 24 heures ! :?
J'éprouve à cette lecture un léger (et plus :( ) désaccord.

A plus tard !

mikhail

MessagePosté: Dim 11 Jan, 2004 17:30
de Muskull
Bonjour :)

Il n'est pas nécessaire de lire l'analyse entière, un rapide survol permet de situer le type d'analyse historique qui est faite.

Les passages que j'ai cité permettent le débat.
Il y a là des idées concernant la "survie" dans les religions celtiques d'éléments "archaïques" comme les aspects magiques dans les mythes et pourquoi pas Cernunnos lui même...

Reprenons Dottin :
"Les druides d'Irlande nous apparaissent surtout comme des magiciens, et des prophètes. Ils prédisent l'avenir, ils interprètent les volontés secrètes des fées, ils jettent des sorts. A l'aide de formules et d'incantations, ils peuvent trouver l'endroit où se cache une personne, accabler un ennemi de toute sorte de maux, faire lever entre deux armées un brouillard épais, faire tomber de la neige, changer le jour, en nuit, rendre grosse une femme stérile. Ils connaissent les breuvages qui font oublier. Ils ont le pouvoir d'imposer des obligations, geis, dont il est impossible de s'écarter et rendre tabous certains objets. Ces geis sont très divers ; tantôt c'est un guerrier qui reçoit la défense de dire son nom à un adversaire ; Mael Duin ne peut emmener trois compagnons en sus d'un nombre déterminé par un druide ; il était interdit à Noïsé de venir en Irlande, en temps de paix sauf avec trois hommes : Cûchulainn, Conall et Fergus. Fergus avait reçu pour loi de ne jamais refuser une invitation et de ne pas quitter un festin avant qu'il ne fût terminé. Cûchulainn était obligé de ne jamais passer près d'un foyer sans s'y arrêter et y accepter à manger ; il lui était interdit de manger du chien. Les prédictions des druides ont pour objet tantôt la naissance, la gloire ou les malheurs futurs d'un enfant ; l'effet meurtrier d'une arme une vengeance dont un vaincu menace son vainqueur."

Une représentation symbolique du couple divin néolithique.
Image

Lorsque le concept de forces "divines" rencontre le "vieux fond shamanique" (VFC :lol: ) pour qui la plus grande dimension humaine est celle de celui qui apaise les calamités naturelles (voir le concept du surhomme de Nietzshe), ce troisième terme sépare les combattants et les maintient en équilibre.
Les représentations du "seigneur des animaux" en cet exercice sont multiples, la dualité antagoniste étant le plus souvent représentée par deux dragons ou "vers". On la retrouve dans le caducée où il est représenté par un bâton ailé, un "axe inspiré du monde". De là aussi le symbolisme de la lance qui donne la mort d'un côté et la vie de l'autre, ainsi que celui de la massue de Dagda.

N'oublions pas non plus l'analyse de Dumezil in "Variations sur les jumeaux indo-européens" sur le mythème du vieil ascète Cyavâna que les dieux craignent et dont il déjoue les ruses.
On retrouve ce thème de façon mineure dans les contes bretons où le héros ou l'héroïne déjoue les ruses du démon Paol Corneg :D

Bref, l'opposition connue de nos jours après des siècles d'évolution de la pensée religieuse entre "l'abandon à la volonté divine" du Sud qui peut être symbolisée par le Mektoub (c'est ainsi) et le concept du Nord qui met en avant la "pureté humaine" pouvant influencer le "destin" semble remonter à la très lointaine antiquité du réchauffement de la planète.

Il est quand même intéressant de remarquer que dans l'ésotérisme des religions, qu'elles soient du Nord ou du Sud, les aspects dualistes (populaires disons) s'estompent et que le trinaire reprend le dessus en tant que modulation essentielle de l'Unité. :wink:

Voili, voilou, vous me faites bosser, j'aimerais des échos :wink:

MessagePosté: Dim 11 Jan, 2004 19:17
de Pierre
Salut Muskull,

Un lion sautant sur une vache, c'est un couple divin :?:
Comment va ton ménage :?: :lol:

@+Pierre

MessagePosté: Dim 11 Jan, 2004 19:34
de Muskull
Une lionne sur un taureau à l'époque ou la "bête" n'était pas domestique :wink:
Les forces brutales terrestres maîtrisées par la violence de la déesse.
Un dualisme où l'homme n'est que spectateur et victime.
Déjà dans le mythe de Gilgamesh, le héros maîtrise Enkidu (le taureau) avec l'assentiment de la déesse ( la maîtresse des fauves).
Ils deviennent amis, jumeaux, premier signe de la trilogie I.E. :wink:

MessagePosté: Dim 11 Jan, 2004 19:38
de Pierre
Muskull a écrit:Une lionne sur un taureau à l'époque ou la "bête" n'était pas domestique :wink:


Euh,

La réponse est pour ma 1ère question, ou alors la 2ème. :lol: :lol: :lol:


@+Pierre