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MessagePosté: Ven 05 Déc, 2008 23:16
de Taliesin
Bonsoir Jakes,

juste une précision concernant les dédicaces de l'HRB. Voici mes notes de lecture de l'étude d'Acton Griscom : The ‘Historia Regum Britanniae’ of Geoffrey of Monmouth, 1929 :

il existe 48 manuscrits du 12ème siècle de l’HRB.

la première version de l’HRB fut dédiée à Robert de Gloucester et Waleran de Meulan (ms. Cambridge), la suivante (un seul exemplaire, ms. Berne) à Robert et Etienne de Blois.

l’HRB a été publiée pour la 1ère fois en avril 1136.

la première édition de l’HRB fut dédiée à Robert et Waleran, la seconde à Robert et Etienne, la troisième à Robert seul, après 1138 et sa rupture avec Etienne - dont Waleran prit le parti à cette date – et avant 1147, date de la mort de Robert.

le ms Cambridge (et six autres semblables) est dédié à Robert puis Waleran. Dans le ms Berne, le nom d’Etienne remplace celui de Robert, et Robert celui de Waleran.

la dédicace à Etienne et Robert date d’avril 1136, lorsque Etienne se trouvait à Oxford, où habitait Geoffroy. La dédicace à Robert et Waleran la précédait de quelques semaines.

MessagePosté: Dim 07 Déc, 2008 12:54
de jakes
Merci Taliesien de ces précisions,

Il n’existe donc pas de triple, mais simplement des doubles dédicaces qui ne peuvent avoir été écrites qu’entre avril 1136 et juin 1138.

Les dédicaces uniques à Robert de Gloucester sont postérieures à sa rupture avec Etienne. Si elles ont été écrites avant la mort de celui-ci en 1147, c’est dans un contexte militaire très mouvant fait de victoires, de défaites et de captures etc.. qui comporte une prise de risque certain: Ainsi Oxford assiégé d’où Mathide s’enfuie in extremis, tombe le 26 septembre 1142.
Ces dédicaces supposent un engagement partisan de leurs auteurs auprè de Mathilde, ou du moins sous sa protection dans les fiefs du sud et de l’ouest de l'Angleterre qui font front contre Etienne.


Je maintiens que la noblesse anglo normande (et en son sein les anglo bretons nombreux), malgré les divisions de la guerre civile, devait avoir reçu unanimement d’un bon œil les thèses de l’HRB aux sujet des Gallois et Bretons, travail d'« historien » s’appuyant sur l’autorité de Bède.

Avant Geoffroy, Bardes et jongleurs anglo bretons et Gallois colportaient la matière de Bretagne, les nugae britonnorum , en Angleterre. Avec probablement un avantage aux Gallois quand on considère le statut de Meilyr Brydydd, Barde de cour chez Gruffydd du Gwynedd, et le prestige de Bledri le Gallois qui restera longtemps une référence obligée de la littérature courtoise.

Après Geoffroy, l’histoire du royaume de Bretagne est tranchée : Elle s’achève définitivement à la mort de Cadvalladr le béni en 689 et la barbarisation saxonne et galloise de la grande ile.

Ceci légitime en effet le nouvel ordre anglo normand (avec toutes ses composantes) sur l’espace anglo saxon , voire au-delà des frontières anglaises si la conquêtes est possible.

qu'on pu retenir du texte de Geoffroy les expéditionnaires d'Alain le Noir, s'il en existe des traces littéraires?

Cordialement..

MessagePosté: Lun 08 Déc, 2008 1:51
de jakes
Bien qu’impliqués assez malheureux dans la guerre civile anglaise (qui se termine pour eux en 1141 à la défaite de Lincoln), les Bretons continentaux du duché de Bretagne seront régulièrement appelés à la défense du comté de Richmond.

Quel est l’impact de l’HRB de 1138 chez les Bretons continentaux et comment expliquer que Lancelot devienne « l’Armoricain » au début du XIIIe siècle ?

Je suivrai le plan suivant :
-Conan Meriadec, neveu d’ Octavius duc des Gewissei selon l’HRB.
-Le lai de Guigemar de Marie de France
-La liste des rois de petite Bretagne de l’HRB est celle que se donnent les ducs de Bretagne au XIVe siècle.
-Cadvallo allié de Peanda de Mercie est le dernier roi régnant sur l’ensemble de la Bretagne, notamment sur la Northumbrie au VIIe siècle, selon l’HRB…. Le comté de Richmond au XIIe siècle.
-Cadvalladr, « dernier roi des bretons » fils de Cadvallo et de la sœur de Peanda « issue de la noble lignée des Gewissei »selon l’ HRB. Caedwalla de Bède.
-Wace en 1155, ne comprenant pas (à voir?) le terme Gewissei, le traduit par Guales, et les fait disparaitre en langue d’oïl.

Pourtant, au cour de la deuxième moitié du XIIe siècle, en langue d'oil et sur le contine : Banz, Pant Genewis, Ganieret, Gormeret, Gaunes, Gannes ? Quelles origines possibles à ce Ban de Benoÿch, le père de ce Lancelot armoricain qui apparaît en 1225?

MessagePosté: Lun 08 Déc, 2008 16:13
de jakes
L’impact de l’HRB de 1136 (je corrige) chez les Bretons continentaux :

-Conan Meriadec, neveu d’ Octavius duc des Gewissei selon l’HRB.
Un débat très technique entre Taliesien et A Y Bourgès a occupé ce fil le 13 janvier (Page 13) puis 2 nouvelles pages du 14 au 17 février 2007 (P 18 à 20). Il y a de la lecture et c’est passionnant !

Que la figure de Conan Mériadec soit déjà connue ou non en Bretagne continentale, il n’en reste pas moins que tous les textes postérieurs à l’HRB attachent ce personnage à la lignée des vicomtes du Léon.
Le chevalier Meriaduc apparaît dans le lai de Guigemar de Marie de France vers 1158 (?)
Ce pourrait être l’effet de la propagande d’Hervé du Léon, gendre du roi Etienne et comte du Wiltshire en 1140,1141.

-Voici la lignée des rois de petite Bretagne que l’HRB permet de constituer :
Conan Meriadec, Budicius , Aldroenus, Hoel, Salomon , Alan.
Il semble bien que cette liste ai fait autorité par la suite en Bretagne continentale, fixant la trame des généalogies ducales et éclipsant en partie les listes anciennes des rois de Domnoné et de Cornouaille.
L’astuce flatteuse de Geoffroy a été d’utiliser des noms des ducs de Bretagne connus de son temps : Conan, Hoel, Alain.
Nul doute qu’Alain le Noir et son fils Conan n'auront pas oublié la leçon de l’HRB.

-Alain le Noir, comte de Richmond aura aussi appris avec bienveillance que Cadvallo a éliminé et ravagé les terres de son rival et demi frère le Saxon Edwin de Northumbrie à la bataille d’Hedfeld (en 633).
La Northumbrie est l’immense région au nord de la rivière Umber , jusqu’a l’Ecosse. En son centre, le Richmondshire actuel qui recouvre l’ancien comté de Richmond.
Ce passage de l’HRB éclaire Alain le Noir sur les méthodes (supposées) de Cadvallo : diviser les saxons pour régner.
Car Geoffroy crédite Cadvallo d’un règne de 48 ans, ce qui est faux puisque Bède nous apprend que Cadvallo mourus à la bataille d'Heavenfield (634) contre Oswald, un an après Hedfeld , occupant sa dernière année à exercer sa tyrannie sanglante sur la Northumbrie.
Selon l’HRB, Il elimine Offric, successeur d’Edwin, envoie son vassal Peanda le païen contre Oswald, puis contre Oswi qui tue Peanda. Wilfert succède à Peanda « avec l’agrément de Cadvallo ». « Wilfert se souleva contre Oswi, mais sur les injonctions de Cadvallo, il fit la paix avec lui ».
Il était temps, Cadvallo le grand roi de Bretagne est repus des massacres où les saxons s’entretuent. Margadud de Demetie n’avait il pas conseillé au roi : « Laisse les au moins se livrer entre eux à des luttes intestines et s’infliger réciproquement des désastres qui les fassent disparaître de notre pays » ?

Petite leçon de politique étrangère adressées aux comtes des marches galloises et écossaises, n’est il pas ?

MessagePosté: Sam 13 Déc, 2008 3:38
de jakes
Geoffroy crédite faussement Cadvallo d’un règne de 48ans après la bataille d’Hedfeld , ce qui nous rapproche rapidement du décès de Cadvalladr du Gwynedd ,emporté par la peste en 882 selon les Annales Cambria.

Ce Cadvalladr, encore très jeune à la mort de Cadvallo attestée par Bède en 634, a été exilé sous la tutelle de Cadfael qui pris la direction des dernières opérations des Bretons allié à Penda. De défaites en défaites, ils seront définitivement circonscrits dans le pays de Galles. Le règne de Cadvalladr, sans faits d’arme significatifs, se cantonnera au Gwynedd.

Geoffroy, qui n’ignore rien de Bède se livre dans le dénouement de l’HRB à une imposture certainement volontaire dont il faudra essayer de comprendre les motifs :

Premier tour de passe passe ;
Il substitue « Cadvalladr , que Bède apelle Caedvalla le Jeune !!! » , à ce jeune prince West Saxon «jeune homme d’une grande vigueur, de la race royale des Gewissae, dixit Bède » qui mourra à Rome en odeur de sainteté confirmé par le Pape Serge en 689, après un règne autrement plus fameux que celui du Cadvalladr Gallois:
Caedvalla, païen, exilé par Centwine du Wessex, en apelle à l’évêque Wilfred de Selsey (Sussex) récupère le wessex en 685, soumet le Sussex, puis le Kent et Christianise de force l’ile de Wight avec la bénédiction de Wilfred en 686.

Deuxième tour :
La mère de Cadvalladr est « la sœur de Peanda , issue de la noble lignée des Gewissei ». « Cadvallo l’avait reçu dans sa couche, après l’accord passé avec son frère, et il avait ainsi engendré Cadvalladr. ».
Il s’agit , selon l’HRB de l’alliance de Cadvallo du Gwynedd en 630 avec le roi païen Penda de Mercie contre Edwin de Northumbrie, connue par Bède qui ne dit pourtant pas qu’elle a été l’occasion d’une union matrimoniale, fut elle barbare.

Cette affirmation de L’HRB " la sœur de Peanda issue de la noble lignée des Gewissei " trouve son origine dans une histoire raportée par Bède qui précède de 40 ans les exploits de Caedvalla le West Saxon:

Penda de Mercie avait montré dès le début de son règne 626-655 ses volontés expansionnistes, annexant en 628 le royaume des Hwuices, saxons de la région de Worcester-Gloucester, jusqu’au Wandsykes . Ce long mur de terre matérialisa sa frontière avec les Gewissae, royaume Saxon indépendant du roi Cynegils 611-643 et de son fils ainé Cwichel 626-637.
L’indépendance des Gewissae fut garantie par le mariage d’une sœur de Penda avec le cadet Cenwalh.
Mais en 443, Cenwalh prenant le pouvoir répudia son épouse, ce qui motiva l’invasion du royaume des Gewissae par Penda.
Cenwalh récupéra son royaume en 448 grâce au soutient des West Saxons acquis par son remariage avec la reine Seaxburg qui co-régna à égalité avec lui.
Les Gewissae furent à partir de cette date intégrés au royaume West Saxons. Cenwald roi du Wessex soumis le Somerset et mourut en 674.
Après lui, seul Caedwalla Prince " issu ... etc ...Gewissae" exilé en 680 selon Bède, se montre capable d’étendre à nouveau son assise territoriale avec l’appui de l’évêque Wilfred et la consécration à Rome en 689.

A l’épilogue de l’HRB , Geoffroy de Monmouth en appelle à Guillaume de Malmesbury et à Henry de Huntingdon pour écrire une suite à son histoire : celle des rois saxons.

Sacré culot quand même!
« Je les invite à ne pas parler des rois bretons puisqu’ils ne sont pas en possession de ce livre en langue bretonne que l’archidiacre Gauthier d’Oxford à rapporté de Bretagne. C’est de cet ouvrage, consacré à l’histoire vrais des rois de Bretagne et écrit en leur honneur, que je vous ai livré la traduction latine. »

MessagePosté: Mar 16 Déc, 2008 10:42
de jakes
Ces auteurs se sont déjà exprimé dix ans avant Geoffroy :
1123 - 1130, l’Historia Anglorum . Henri de Huntington suis Bède : “Sed cum Cedwalla esset rex Gevissorum” sans confusion possible avec un roi breton.

1126, la Gesta Regum Anglorum. Guillaume de Malmesbury stigmatise les Nugae Britonorum dans un contexte où bardes gallois et anglo-bretons répandent les thèmes arthuriens.
ll vise aussi la vita Gidae de Caradoc de Llancarfan, comté du Glamorgan sous domination normande .

Les Gallois indépendants y participent pleinement :
Le conte de Culhwch ac Olwen est mis par écrit.
Meilyr Brydydd (1081-1137) est le barde officiel de la cour de Gruffydd du Gwynedd et de ses fils Owain, Cadwallon, Cadwalatr.
Le Gallois Bledri sera la référence obligée de la littérature courtoise tout au long du XIIe siècle.

Au décès d’Henry Beauclerc en 1135, la querelle dynastique divise l’Angleterre alors que Gallois et Ecossais sont menaçants aux frontières.

Geoffroy de Monmouth, Anglo-breton qui s’inscrit naturellement dans cette tradition bretonne, prend le parti en 1136 de donner une base historique à ces nugae arthuriennes en ruinant les prétentions galloises à l’héritage des rois de Bretagne.
Il semble que son appel en direction de Henry de Huntington, Guillaume de Malesbury et Caradoc de Llacarfan a les accents d’une demande de caution bienveillante à ses petits mensonges, au nom de l’unité nationale de l’Angleterre.

Cordialement,

MessagePosté: Mer 17 Déc, 2008 5:24
de jakes
Piqûre de rappel aux impatients: Lancelot fils de Ban de Benoïch x B. de Gaunes < Lanzelet fils de Pant Genewis (Ulrich von Zatziskhoven en 1194)< Peanda-Gewissei (G de Monmouth, l'HRB en 1136) < Penda, Gewissae (Bède le vénérable en 731).

Après les Gewissae de Bède (VIIe siècle), Les Gewissi des Annales Cambria (Xe siècle), le rex Gevissorum de Henry de Huntington de 1123, Geoffroy de Monmouth est le premier auteur qui dote les Gewissei d’une ancienneté dont aucuns de ses prédécesseurs ne se seraient jamais doutés.
Depuis Bède, Il est clair pour tout ces auteurs qu’il s’agit des saxons de la ligné de Cerdic et Cenric, les plus anciens colons saxons connus établis au nord du Wessex.

Geoffroy introduit des nouveautés toutes personnelles :
- Il invente dans l’HRB leur reine éponyme Genvissa, fondatrice avec l’empereur Claude de Gloucester.
- puis Octavius, oncle de Conan Meriadec et duc des Gewisséens.
-Vortegirn est le chef des Gewisséens.
Selon Geoffroy, les Gewisséens sont l'un des peuples de Bretagne, bien avant la première apparition des saxons.

(Plus loin , l'invasion saxonne est avérée: Merlin prophétise le combat des « perfides » hommes de Galabes (les Gewisséens) contre ceux de Venédotie. Et enfin la mention selon laquelle la mère de Cadvalladr est la sœur de Peanda, issue de la noble lignée des Gewisséens.)


Ces innovations littéraires, facilement réfutables par tous les contemporains instruits de Bède (notamment ceux qu’il interpelle à la fin de l’HRB), permettent à Geoffroy d’intégrer tous les habitants du centre- ouest britannique, west saxons en premiers, à l’antique histoire de Bretagne.
Il prend soins de décrire leur afaiblissement à partir du premier exil de la noblesse bretonne avec Maxime et Conan Mériadec : Les Gewissei doivent leur nom à la reine qui s’allia à Claude l’empereur romain, ils sont gouvernés par le duc Octavius dont l’héritier Conan se perd en Armorique, Ils leurs restent des chefs sans envergures, Vortegirn étant celui par qui l’invasion saxonne arrive, Ils sont perfides selon Merlin. Mais ils tiennent jusqu’à la fin de l’HRB leur " noble lignée " curieusement associée à Peanda.

Au vu du succès de l’HRB en Angleterre et en l’absence de polémique, Geoffroy de Monmouth aura réussi, semble t’il, a relocaliser l’histoire des rois de Bretagne sur une vaste partie du territoire anglo normand.
Dans le même temps il discréditait les prétentions galloises et encensait le soutien régulier (? selon quelles sources?), des Bretons continentaux à la noblesse de Bretagne.

A deux doigt de se déchirer malgré les menaces aux marches galloises et écossaises, le roi Etienne et la noblesse anglo normande en 1136 n’attendaient pas de meilleur prédicateur.


Cordialement, jakes

MessagePosté: Sam 20 Déc, 2008 1:16
de jakes
De Bède à Henry de Huntington, l’histoire de l’Angleterre commençait avec les invasions saxonnes vers 430.
L’HRB réinvente pour l’Angleterre une continuité « historique » avec l‘antique Bretagne jusqu'à la mort de Cadvalladr en 689, son dernier roi avant La barbarisation saxonne et galloise de l’île.

Le thème dut plaire aux nouveaux maitres anglo normand, passablement agacés, mais aussi fascinés par les nugae des jongleurs gallois et bretons.
Les aspirations à la paix, à l’unité anglaise et au compromis alors que la guerre civile s’éternisait, assurèrent le succès de l’HRB.
A l’avènement d’Henri Plantagenêt en 1154, Wace met en vers anglo normands le récit l’HRB.

Mais Wace, ignorant de Bède et ne comprenant pas le terme Gewissei, le traduit par Guales (pays de Galle) dans toutes les occurrences du texte de l’HRB.

A la fin de sa traduction, il les occulte carrément au vers 14657 :

Chadwaladres emprès regna,
Fiz Chadwalein , niès Peanda
Niès Peanda, fiz sa sorur
Co fud uns reis de grant amur.



Avec Wace, les Gewissae disparaissent pour 40 ans des romans de langue d’oïl.....
... Si on admet l’appartenance aux langues d’oil du « welches buch » aporté en Allemagne en 1194 par l’anglo normand Hugues de Morville et qui sert de modèle au Lanzelet fils de Pant Genewis d'Ulrich von Zatzikhoven.

Cordialement,

MessagePosté: Dim 28 Déc, 2008 2:55
de jakes
Quel aurait été le destin de la matière de Bretagne, matière populaire (du sud ouest britannique ?) ou étrangère (galloise), sans sa mise à la mode par Wace dans les parlés d’oïl des classes dominantes ? : Cours anglo normandes, angevine, cour des ducs de Bretagne, cour royale d’Ecosse (je pense à la proximité de Richmond).

Probablement un destin avorté.

Je ne connais pas d’auteur qui se soit intéressé à l’impact immédiat de l’HRB, texte latin, chez les locuteurs « étrangers » aux domaines des langues d’oïl, présents sur le terrain de la guerre civile anglaise : Flamands (peu concernés), Anglo saxons (dominés), Gallois (avec leur tradition arthurienne autonome), les Ecossais et les Armoricains d’Alain le Noir.
Faute de textes contemporains attestés dans ces nations, ne pourrait-on rien dire ?


....ca hiberne dur.
Et bien ! Je ne sais pas si ce grand silence sur cette branche de l’arbre celtique est confortable.
Une critique sévère m’aiderait a bouger, voire même à en finir sur ce sujet s'il est sans intérêt.

un peu frigorifié, Jacques.

MessagePosté: Dim 28 Déc, 2008 12:24
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

Les questions posées constituent un véritable relevé de conclusions provisoires : dans l'état actuel de nos connaissances, on ne peut effectivement rien dire ou presque de la réception contempraine de l'HRB, sinon chez les clercs ; mais après tout, n'était-ce pas la destinée d'un ouvrage écrit en latin ?

Cependant, je serais pour ma part tenté de penser que les Bretons insulaires ou continentaux ont largement bénéficié de l'apport de ce texte pour nourrir leur tradition - pas si autonome que çà au demeurant - par le biais des latinarii, dont le rôle de "passeurs" culturels a été récemment rappelé, à propos de Bleddri par M. Aurell dans son excellente synthèse sur la légende du roi Arthur (p. 211-217) : en effet, on ne peut pas exclure l'hypothèse que ce "passage" a pu s'opérer dans les deux sens, comme en témoigne le Brut y Brenhinedd.

La traduction/transposition de Wace a quant à elle permis la diffusion de l'oeuvre de Geoffroy de Monmouth à une échelle plus vaste au point de vue géographique ; mais faut-il conclure que ce type de diffusion, lié essentiellement au développement du phénomène "courtois", est incompatible avec une imprégnation par capillarité de populations ethno-linguistiquement différenciées ? Cela n'est pas sûr, car il existait, là encore, de nombreux "passeurs" parmi les curiales dont Walter Map nous a conservé les Nugae.


Bien cordialement,

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Jeu 01 Jan, 2009 1:00
de jakes
bonne nouvelle année à tous !!!!

MessagePosté: Jeu 01 Jan, 2009 2:00
de Pierre
Boejour Jakez,


Une bonne et excellent année à toi aussi :98:

Que te souhaiter de plus, à part ... un peu plus de réponses à tes messages :wink:

@+Pierre

MessagePosté: Ven 02 Jan, 2009 21:44
de jakes
Déboires conjugaux des guerriers conquérants !

Je ne résiste pas à citer un extrait assez long d’Orderic Vital qui montre que l’aristocratie anglo normande connaissait les antiques « Gewissae » au début du XIIe siècle.

Les sites anglo saxons sont d’ailleurs plutôt bien fournis sur ce peuple ignoré de ce coté ci de la Manche.( Tapez « Gewissae » en recherche internationale.) Normal, ce sont pour grande partie leurs ancêtres!




Even though the Norman monk Orderic Vitalis wrote his massive work[i]((L'Historia ecclesiastica) at the abbey of Saint Évroult in Normandy between the years 1114 and 1141, his wide connections among the Norman nobility meant that he was well informed about events from the middle of the eleventh century and on: The Impact of the Norman Conquest of England on Marriage (2:219, 221)

”At this time certain Norman women, consumed by fierce lust, sent message after message to their husbands urging them to return at once, and adding that unless they did so with all speed they would take other husbands for themselves. For they dared not join their men themselves, being unaccustomed to the sea crossing and afraid of seeking them out in England, where they were engaging in armed forays every day and blood flowed freely on both sides. The king, with so much fighting on his hands, was most anxious to keep all his knights about him, and made them a friendly offer of lands and revenues and great authority, promising them more when he had completely rid the kingdom of his enemies. His loyal barons and stalwart fighting-men were greatly perturbed, for they saw that continual risings threatened the king and their brothers, friends, and allies, and feared that if they abandoned him they would be openly branded as traitors and cowardly deserters. On the other hand, what could honorable men do if their lascivious wives polluted their beds with adultery and brought indelible shame and dishonor on their offspring?
As a result Hugh of Grandmesnil, who was governor of the Gewissae - that is, the region around Winchester - and his brother-in-law Humphrey of Tilleul, who had held the castle of Hastings from the day of its foundation, and many other departed the country heavy at heart, and unwilling to go because they were deserting the king whilst he was struggling in a foreign land. They returned to Normandy to oblige their wanton wives; but neither they nor their heirs were ever able to recover the fiefs [in England] which they had held and chosen to abandon.”[/i]


Governor of the Gewissae...!!! Je serai curieux de connaitre l'expression latine originale d'Orderic Vital.
S'il s'agit il d'un titre officiel, c'est tout à fait exeptionnel à cette date!
Et Hugh de Grandmesnil 1032-1098 était surtout fiéfé dans le Leicestershire selon le Domesday book.

ca chauffe pas mal sur la piste d'Hervé du Léon, seigneur de Devize et comte du Wiltshire en 1141, je pense.

Comptant sur vos contributions,

Bloavez mad !

MessagePosté: Sam 03 Jan, 2009 1:20
de André-Yves Bourgès
jakes a écrit:Governor of the Gewissae...!!! Je serai curieux de connaitre l'expression latine originale d'Orderic Vital.
S'il s'agit il d'un titre officiel, c'est tout à fait exeptionnel à cette date!
Et Hugh de Grandmesnil 1032-1098 était surtout fiéfé dans le Leicestershire selon le Domesday book.


Oui, mais ce serait bien d'avoir la référence précise, car je n'ai pas le courage de relire l'ensemble de l'Historia du vieil Orderic !

AYB

MessagePosté: Sam 03 Jan, 2009 9:58
de André-Yves Bourgès
André-Yves Bourgès a écrit:Oui, mais ce serait bien d'avoir la référence précise, car je n'ai pas le courage de relire l'ensemble de l'Historia du vieil Orderic !


Allez, puisque c'est le début de l'année, voici le texte d'Orderic (Patrologia latina, t. 188, col. 315) correspondant au passage qui intéresse Jakes :

Unde Hugo de Grentemaisnil, qui praesidatum Gewissorum, id est Guentanae regionis, jam habuerat, et sororius ejus Unfridus de Telliolo, qui Hastingas a prima die constructionis ad custodiendum susceperat, aliique multi discesserunt, et regem inter exteros laborantem tristes et inviti desuerunt. Deinde famulari lascivis dominabus suis in Neustriam reversi sunt ; sed honores, quos jam nactos hac de causa reliquerunt, ipsi vel haeredes eorum nunquam postea recuperare potuerunt.

Voir en ligne le même passage dans l'édition donnée par A. Le Prévost en 1840.

Je n'ai pas accès à la récente édition de M. Chibnall.

En tout état de cause, il ne s'agit pas d'un titre "officiel", mais bien d'une réminiscence de la part du chroniqueur.

Bien cordialement,

André-Yves Bourgès